Climat et évolution de la pneumonie dans une ville du Centre-Nord de la Côte d’Ivoire : Bouaké

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Béh Ibrahim DIOMANDE, Bosson Amédée KOUAME

Résumé

La pneumonie se contracte parfois en inhalant les particules contaminées. La présente étude se propose de rechercher les relations entre le climat et cette pathologie dans la ville de Bouaké. Le lien entre les conditions climatiques et la pneumonie est parfois indirect car elles agissent sur des facteurs sociaux comme l’insalubrité, les activités économiques avant que ceux-ci n’affectent nos organes respiratoires. De plus, les différentes corrélations obtenues ne sont pas totales. En effet, d’autres paramètres interviennent dans l’explication de la pneumonie. Les courbes issues des morbidités montrent une saisonnalité de cette maladie à l’échelle de la ville de Bouaké. Aussi, la cartographie de ces données mensuelles et annuelles de celle-ci indique-t-elle une répartition inégale des taux de consultation à Bouaké. Une telle inégale répartition est due à la physionomie de chaque quartier de la ville.

Mots-clés : Bouaké-climat-pneumonie

Abstract :

Key words:

INTRODUCTION

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Climat et évolution de la pneumonie dans une ville du Centre-Nord de la Côte d’Ivoire : Bouaké

Béh Ibrahim DIOMANDE, Bosson Amédée KOUAME

Résumé :FrançaisEnglish


La pneumonie se contracte parfois en inhalant les particules contaminées. La présente étude se propose de rechercher les relations entre le climat et cette pathologie dans la ville de Bouaké. Le lien entre les conditions climatiques et la pneumonie est parfois indirect car elles agissent sur des facteurs sociaux comme l’insalubrité, les activités économiques avant que ceux-ci n’affectent nos organes respiratoires. De plus, les différentes corrélations obtenues ne sont pas totales. En effet, d’autres paramètres interviennent dans l’explication de la pneumonie. Les courbes issues des morbidités montrent une saisonnalité de cette maladie à l’échelle de la ville de Bouaké. Aussi, la cartographie de ces données mensuelles et annuelles de celle-ci indique-t-elle une répartition inégale des taux de consultation à Bouaké. Une telle inégale répartition est due à la physionomie de chaque quartier de la ville.

Mots-clés : Bouaké-climat-pneumonie

Introduction

De 1970 à 2015, les indices de Nicholson montrent des équations de droite y=0,0501x -1,1442 pour les températures et y=-0,0109+0,00434 pour les précipitations. Les signes des coefficients directeurs des différentes droites montrent une hausse thermique et une diminution pluviométrique à Bouaké durant la période. Une telle situation entraîne des déconvenues sanitaires au sein des communautés humaines (B. I. Diomandé et al, 2017, p.12). C’est le cas de la pneumonie dans la ville de Bouaké. Cette ville est située entre les coordonnées 7°37 et 7°45 de latitude Nord et 4°57 et 5°7 de longitude Ouest (Figure 1) avec une population estimée à 536 189 habitants (RGPH, 2014). Elle est drainée par trois bassins versants dont la Loka au Nord, le Kan au Sud et le bassin versant de Soungourou à l’Est. Bouaké bénéficie d’un réseau hydrographique secondaire très dense sur des pentes modérées en milieu de socle au sommet d’un horst granitique (K. Atta,1978, p.57). Sur la période de 2009 à 2015, on a enregistré environ 125246 personnes atteintes de pneumonie d’après les systèmes d’information et de gestion des districts sanitaires de la ville de Bouaké. Face à l’évolution drastique des paramètres du climat et du nombre de cas de pneumonie, l’on est amené à s’interroger sur le rapport entre ces deux variables. La variabilité des facteurs du climat entraîne-t-elle une évolution de la pneumonie dans la ville de Bouaké ? L’étude vise principalement à montrer que la variabilité des paramètres climatiques accroît la pneumonie dans la ville de Bouaké. Spécifiquement, il s’agit d’abord d’analyser la saisonnalité du climat à Bouaké et son lien avec l’évolution de la pneumonie, de caractériser ensuite la répartition spatiale de la pathologie entre 2009-2015 et enfin d’identifier les risques de développement de cette pathologie à l’échelle de la ville de Bouaké.

Figure1 :Situation de la ville de Bouaké

Source : BNETD Réalisation : Kouamé Bosson Amédée , 2016

1-Méthodes de recherche

1-1-La méthode de collecte des données

L’on a eu recours à un ensemble de méthodes telles que : les enquêtes de terrain, les observations directes et la recherche documentaire pour collecter les données. Des données primaires et secondaires tant qualitatives que quantitatives ont été obtenues.

1-1.1. L’observation sur le terrain

Cette démarche a permis de visiter les quartiers de la ville de Bouaké afin de comprendre leur physionomie, d’observer leur niveau de salubrité et de s’imprégner des types d’activités qui s’y exercent au quotidien. Il était aussi question de voir la relation climat-physionomie de ces espaces pour justifier l’état épidémiologique de cette pathologie.

1-1.2. La collecte des données climatologiques et sanitaires

Les données climatologiques (pluviométrie et température) et sanitaires furent obtenues dans différentes structures spécialisées. En effet, les données climatologiques de 1970 à 2015ont été obtenues au Centre National de Recherche Agronomique (CNRA) et à la Société de Développement et d’Exploitation Aéroportuaire, Aéronautique et Météorologique (SODEXAM). Le Centre Régional de la Santé de Bouaké a délivré des attestations permettant d’avoir accès aux données épidémiologiques et des grandes endémies entre 2009 à-2017 dans différents centres de santé dans la ville de Bouaké. Pour la collecte des données sur la pneumonie, la ville de Bouaké a été répartie en trois grands secteurs sanitaires suivant la délimitation régionale de la santé publique.

1-1.3 Les enquêtes de terrain

Dans le cadre de l’étude, plusieurs enquêtes ont été menées auprès des structures sanitaires. Ainsi, les professionnels de santé publique et privée ont été entretenus pour comprendre le rapport climat-pneumonie. Compte tenu de la lente évolution des phénomènes climatiques dans le temps, les personnes ciblées avaient généralement un âge supérieur à 30.

1-2-Le traitement des données

1-2-1. Le traitement des données climatologiques

La démarche a consisté à proposer une analyse statistique des paramètres pluviométriques et thermiques. Ils restent nécessaires dans l’explication des pathologies dans la zone intertropicale. Notre période d’étude choisie s’étend sur 46 ans, soit de 1970 à 2015. Les interactions climat et pathologie ont été ensuite spatialisées grâce à des méthodes cartographiques.

1-2-2-La méthode de détermination des saisons

Les méthodes de GAUSSEN (P = 2T) et de BIROT (P = 4T) sont fréquemment utilisées pour déterminer les mois secs et les mois pluvieux. Dans le cadre de cette étude, la détermination des saisons a été faite selon la méthode de BIROT, c’est-à-dire P = 4T (P étant la précipitation moyenne du mois et T, la température moyenne du même mois). De ce fait, le mois est dit sec, si P < 4T. A l’opposé P > 4T pour un mois signifie que ce mois est humide. L’analyse des données climatologiques concernait la période 1970-2015 mais la mise en corrélation entre les paramètres du climat et la pneumonie a porté sur la période 2009-2015. Les données épidémiologiques de la pneumonie disponibles ne couvrent que cette période. Les données sanitaires mensuelles prises par centre de santé sur une période de sept années ont été additionnées, groupées par centre de santé puis par secteur sanitaire. Leurs moyennes par mois, saison et année ont été faites pour analyser la dynamique de la pneumonie dans le temps à l’échelle de la ville de Bouaké, des secteurs sanitaires et des centres de santé urbains voire des quartiers. Ces moyennes ont permis les représentations graphiques (figures).

1-2-3. Etude de corrélation entre le climat et la pneumonie

En vue de montrer l’existence ou non d’un lien entre la pluviométrie, les températures et la pneumonie, le coefficient de corrélation de Pearson a été utilisé. Le coefficient de corrélation linéaire simple de Pearson est une normalisation de la covariance par le produit des écarts-types de plusieurs variables. La matrice de corrélation de Pearson entre deux variables x et y est établie par la

formule suivante :     . La mesure de r est définie entre : -1 < r < 1.

Le coefficient de corrélation de Pearson sert à caractériser une relation linéaire positive ou négative. Ainsi, la valeur positive indique qu’il y a un lien direct entre les variables (si une variable augmente, l’autre augmente). La valeur négative indique le lien inverse (si une variable augmente, l’autre diminue). L’intensité de la relation entre les variables est déterminée par r en valeur absolue.

Ainsi on a :

  •  De 0 à 0,1 : aucun lien ou très faible ;
  •  De 0,2 à 0,39 : lien faible ;
  • De 0,4 à 0,59 : lien modéré ;
  • De 0,6 à 0,79 : lien fort ;
  • 0,8 et plus : lien très fort.

Le coefficient de Mann-Kendall ou « r » est défini pour mesurer l’association entre des variables ordinales.

Pour notre étude, nous avons utilisé le coefficient de Mann-Kendall sur le logiciel Excel. Ce coefficient s’interprète comme celui de Pearson. Il est compris entre -1 et +1. Plus il s’approche de 1, plus on est certain qu’il existe une corrélation positive (variations dans le même sens), plus il est proche de -1 et plus on peut supposer l’existence d’une corrélation négative. Enfin, s’il est proche de zéro, la probabilité qu’il n’existe aucune liaison monotone entre les deux est forte. Par « liaison monotone », il faut entendre une liaison linéaire, logarithmique, exponentielle. Le coefficient de détermination R²indique le poids ou l’intensité d’un phénomène sur un autre ; c’est-à-dire, un phénomène reste dépendant d’un autre. Ainsi, on peut distinguer une variable explicative et une variable expliquée. Dans le cadre de cette étude, il permet de comprendre à quel pourcentage les températures et les précipitations contribuent à la hausse du taux de morbidité de la pneumonie dans la ville de Bouaké. Il permet ainsi de voir le degré d’intensité que les températures et les précipitations ont sur la pneumonie. Pour un coefficient de détermination équivalant à 0,75 entre la température et la pneumonie, on dira : le coefficient de détermination R² = (0,75) indique que la température contribue à une fluctuation de75% des cas de pneumonie. Pour un coefficient de corrélation R= -0,27 entre les précipitations et la pneumonie, on dira : le coefficient de corrélation R = -0,27 révèle une faible influence des précipitations sur les fluctuations de la pneumonie.

1-2-4. Traitement cartographique des données

La répartition spatiale de la pneumonie dans chaque centre de santé au sein des secteurs sanitaires s’est basée sur la cartographie. Une carte des espaces à risques de pneumonie a été ensuite conçue à partir des données brutes sur la pneumonie.

2-Résultats de l’étude

2-1. Caractéristiques des saisons dans la ville de Bouaké

Sur la période 1970-2015, quatre décennies peuvent être observées. Ainsi, de 1970 à 1979, on compte 69 mois secs et 51 mois humides. On note également75 mois secs contre 45 humides entre 1980 et 1989.De 1990 à 1999,73 mois secs contre 43 humides ont été dénombrés. Pire,au cours de la dernière décennie (2000-2015), 101 mois secs ont été révélés contre et 91 mois
humides. A travers cette analyse, on observe une variabilité de la pluviométrie entre 1970 et 2015. On y observe également un découpage saisonnier avec plusieurs périodes. La grande saison pluvieuse s’étale d’avril à juin avec un début incertain concernant le mois de mars. Les fortes pluies sont concentrées au mois de juin. La petite saison pluvieuse s’étale sur les mois de septembre et octobre. En cette saison, le mois de septembre est plus pluvieux que celui d’octobre. La grande saison sèche concerne les mois de novembre, décembre, janvier et février. Ces mois sont les plus secs de la période. La petite saison sèche s’établit à partir de juillet pour finir en fin août. Sur la chronologie de 45 ans, les mois de juillet et août ont longtemps demeurés humides (Tableau 1).

Tableau 1 : Les mois secs et pluvieux dans la ville de Bouaké

Source : SODEXAM, 2015 Réalisation : Kouamé BossonAmédée, 2016

2-2-Impacts de la variabilité thermique et pluviométrique sur l’évolution de la pneumonie dans ville de Bouaké.

La relation de Pearson entre les températures et le taux de pneumonie à Bouaké est de 0,63. Elle indique un lien positif et fort. Le coefficient de détermination R² entre les moyennes thermiques annuelles et les moyennes annuelles de pneumonie est de 0,63. Cela indique que les températures et la pneumonie évoluent dans le même sens et qu’une fluctuation thermique engendre une fluctuation des taux de pneumonie. Il témoigne également de la dépendance de la pneumonie à 63% des températures. Le coefficient de corrélation R entre les données thermiques et celles de la pneumonie s’évalue à 0,80. cela indique une forte influence de la température sur la pneumonie. Le coefficient directeur de l’équation de droite issue de la courbe de variation de la pneumonie au cours de la période 2009-2015 est égal à 1088,8. Il est positif et signifie par conséquent que les taux de pneumonie à Bouaké sur cette période ont une tendance à la hausse de 1089 cas par an. Ainsi, à cette période de l’année, il y a 1089 cas potentiels de pneumonie susceptibles d’être déclarés. Avant 2011, les températures étaient relativement basses. Cela maintenait les taux d’évolution de la pneumonie qui étaient bas. Mais dès 2012, les températures et les taux de pneumonie ont flambé concomitamment (Figure 2).

Figure 2 : Evolution conjointe de la température et la pneumonie à Bouaké (2009-2015)

La relation de Pearson est faible et indirecte entre les précipitations et la pneumonie à Bouaké. Le coefficient de détermination R² qui résulte de leur rapport est de 0,13. Les précipitations influencent donc à 13% les taux de pneumonie. Le coefficient de corrélation R obtenu est égal à -0,36. Il indique une faible et indirecte influence des précipitations sur les taux de morbidité de la pneumonie dans la ville de Bouaké. Tout au long de la période 2009-2015, les précipitations ont connu une tendance à la baisse estimée à -38,954 mm de pluie chaque année suivant l’équation y = -38,954 + 1314,9. La pneumonie a connu une hausse de 1088,8 cas par an au regard de l’équation y = 1088,8 + 1479,4. Pour une baisse annuelle des précipitations dans l’ordre de 38,95 millimètres. La morbidité liée à la pneumonie est de 1088,8 cas par an. C’est-à-dire qu’au moment où les précipitations baissent, le taux de pneumonie s’amplifie. Donc, la baisse des précipitations influence l’émergence de la pneumonie (Figure 3).

Figure 3 : Evolution conjointe des précipitations et la pneumonie à Bouaké (2009-2015)

2-3- Saisonnalité et répartition spatiale de la pneumonie dans la ville de Bouaké

En fonction des quatre saisons climatiques de l’année observées dans la zone d’étude, l’on peut faire les remarques suivantes : la petite saison pluvieuse a plus de cas de morbidité avec un total de 14789 patients enregistrés dans les centres de santé de Bouaké.

Elle est suivie de la petite saison sèche en matière de nombre de consultation avec 10655 cas. Les deux grandes saisons enregistrent les chiffres les plus bas avec respectivement 9623 (grande saison pluvieuse) et 9122 pour la grande saison sèche. Cette situation pourrait s’expliquer par plusieurs facteurs. La petite saison pluvieuse intervient à un moment où la flore dans sa grande majorité est en floraison dans la zone d’étude. Les pollens des plantes et des arbres amplifient aussi la contamination de
la pneumonie. Il en de même pour les ordures ménagères en putréfaction qui peuvent véhiculer des germes de la pathologie chez les personnes sensibles (figure 4).

Figure 4 : Saisonnalité de la pneumonie dans la ville de Bouaké

Par centre de santé, la répartition spatiale de ces données sur la pneumonie reste inégale. Le nombre de cas de consultation varie également selon les mois. Mais en toute saison de l’année, certains centres de santé de la ville se distinguent par le nombre élevé de consultation de cette pathologie. Ils enregistrent toujours les plus grands nombres de patients en matière de pneumonie. Il s’agit des centres de santé urbains de Sokoura et koko. Ces nombres sont relativement élevés à Ahougnansou, Djézoukouamé et à Beaufort. Dans les autres centres de santé, ces chiffres sont faibles (Figure 5). Cela se justifie par le fait que plusieurs autres facteurs expliquent l’émergence de cette pathologie à Bouaké.

Figure 5 : Carte de la pneumonie dans les centres de santé urbains à Bouaké

2-4-Risques de développement de la Pneumonie dans la ville de Bouaké

A Bouaké, les risques de développement de la pneumonie sont nombreux. Deux grands facteurs permettent de l’expliquer. Ce sont l’environnement physique et l’environnement socio-économique.

2-4-1. L’environnement physique comme facteur de risque de la pneumonie

En saison sèche, la végétation produit de la poussière qui porte atteinte au système respiratoire. Elle produit en effet des pollens en tant qu’allergènes qui peuvent se loger dans les poumons et causer des dommages sanitaires. Pendant la saison pluvieuse, l’eau
occupe le bas de ces végétaux. La présence de l’humidité occasionne le dépôt progressif de micro-organismes volatiles, des moisissures ou des mauvaises odeurs nocives à la respiration. Le vent déplace facilement ces particules vivantes dans toutes les directions. Ces particules vivantes menacent la santé des riverains. Aussi, en bordure des cours d’eau, observe-t-on des fleurs et une végétation graminéenne éjectant régulièrement leurs pollens.
A Bouaké, les cours d’eau dans la ville sont un facteur de risques en matière de pneumonie. Ils sont généralement des dépotoirs des déchets dangereux et des ordures ménagères. Ils peuvent occasionner des risques de pneumonie suite à une pollution. L’élevage en plein milieu de la ville provoque l’accumulation de plusieurs matières organiques comme les excréments, les urines, les poils d’animaux et même des pucerons. Ces matières peuvent s’accumuler et contaminer l’environnement ainsi que l’air avant d’atteindre les alvéoles.
Les eaux de ruissellement transportent les particules organiques précitées jusqu’aux cours d’eau pour en faire des sources de parasites et de vecteurs (Photo 1). Les milieux physiques sont des environnements favorables à la persistance de la pneumonie à Bouaké. Ils génèrent des particules qui pénètrent dans nos circuits aériens.

Photo 1 : La rivière Aboliba envahie par les ordures toxiques et ménagères à Koko-mamianou

Auteur : Bosson Amédée, le 15 /09/ 2016)

2-4-2. L’environnement socio-économique comme facteur de risque de pneumonie à Bouaké

Les voies routières exposent aux vecteurs de la pneumonie. Sous l’effet des saisons climatiques combinées aux activités humaines, elles deviennent des foyers de vecteurs capables de provoquer des infections respiratoires. L’état des caniveaux est un véritable risque dans les quartiers de la ville. Les caniveaux furent conçus pour l’écoulement des eaux de ruissellement.
Ils ont assuré cette fonction pendant un moment mais sous l’effet des conditions environnementales comme l’érosion, le déversement des déchets et ordures ménagères, ces ouvrages sont encombrés. Les eaux usées ne coulent plus, elles stagnent ; ce qui fait des caniveaux des foyers toxiques d’où se dégagent des mauvaises odeurs. Au-delà des caniveaux, les rues constituent des foyers d’immondices avec leur corollaire de production de vecteurs. On y constate un réseautage d’eaux usées qui tire son origine des ménages. A l’intérieur de ce réseautage, on distingue divers types d’ordures comme les déchets plastiques, des bouteilles, des déchets d’animaux et des plumes de volaille. L’ensemble donne un aspect à la fois verdâtre et noirâtre aux réseaux d’eau dans les rues. A Bouaké, ces espaces en putréfaction constituent des aires de jeu d’enfants et des espaces de causerie des adultes. La poussière des véhicules se diffuse dans les habitations et sur les produits de consommation. Les fumées organiques
menacent le système respiratoire qui à force de réagir entraîne les types de pneumonie. Les routes deviennent donc des espaces à risques de pneumonie à Bouaké (Photo 2).

Photo 2 : Les fumées toxiques comme facteur de la pneumonie à Bouaké

Auteur : Bosson Amédée jeudi 15/09/ 2016

Les ordures telles que les restes de manioc, l’eau de manioc, les sachets plastiques, la végétation morte, l’eau de latrines s’observent dans les quartiers de la ville de Bouaké. Par exemple, une interaction naît entre le lieu de production de l’attiéké et l’environnement car la pression de la pâte entraîne un dépôt de liquide amidonné. Plus tard, ce liquide se décompose et dévient un
facteur parasitaire. L’eau de pluie et celle déversée par les populations occupent les creux. Dans ces creux, les ordures flottent dans l’eau. Des magasins, des restaurants et des ateliers sont les voisins immédiats de ces dépôts qui, en principe, n’ont pas raison d’être. La couleur noirâtre prouve que des éléments s’y décomposent couramment. L’eau polluée va contaminer les aliments des environs. Les débris en décomposition vont contaminer l’air et donc les poumons pour ainsi créer des conditions propices à la pneumonie. Ainsi, plusieurs activités économiques obsolètes favorisent les conditions de pneumonie à Bouaké (Photo 3).

3-Discussions des résultats de l’étude

Le climat de Bouaké connaît une variation. Les différentes saisons pluvieuses se raccourcissent au profit des mois secs. Cela est en accord avec les conclusions de nombreuses études sur cette zone à l’instar de de celles de B.I. Diomandé et al, (2016, P.148). Selon ces auteurs, l’évolution pluviométrique se traduit par une baisse avec une hausse exponentielle des températures dans cette région des savanes. L’étude a également montré que le lien entre les facteurs climatiques et la pneumonie est fort dans la ville de Bouaké. Il existe une corrélation évidente entre le climat et les symptômes respiratoires (A. Githeko et al, 2000, p.1). Cependant, le climat n’est pas le seul facteur de risque d’évolution de cette pathologie. L’environnement physique et socioéconomique permettent aussi d’expliquer la spatialisation de la pneumonie. En effet, certaines espèces végétales comportent des risques pour notre respiration. Ces végétaux dégagent des particules inhalables et/ou des odeurs nuisibles comme le soulignaient M. Thibaudon et al
(2007, p.6). De surcroît, la voirie expose à la poussière qui reste nuisible à la respiration. B.Nigel et al (2000, p.1) vont plus loin en disant que les fumées organiques menacent notre système respiratoire et entraînent d’autres types de pneumonie. Les cours d’eau qui traversent la ville de Bouaké sont également un facteur de risque de pneumonie car devenus des dépotoirs urbains.

Conclusion

Le climat de la ville de Bouaké a connu des variations sur la période 1970-2015 au regard des hausses thermiques et de la baisse des précipitations. Les consultations hospitalières pour les cas de pneumonie augmentent également selon les années. Parallèlement aux variations des températures ou des précipitations, les cas de prévalence de pneumonie augmentent dans cette
ville. Mais il y a d’autres facteurs explicatifs du phénomène. Ce sont les facteurs environnementaux. Ils amplifient les facteurs climatiques. Les taux de pneumonie ne sont pas uniformes sur toute l’année. Les mois de l’année présentent un taux non négligeable de la pneumonie mais les forts taux s’observent aux mois de novembre et octobre. L’analyse saisonnière montre les forts taux de pneumonie pendant et après les mois pluvieux. A cet effet, il importe d’affirmer que la pneumonie observe la saisonnalité climatique dans l’espace urbain de Bouaké. Spatialement, on constate une inégale distribution de la pathologie. Cette
distribution suit sensiblement l’état de salubrité et les activités à caractère notamment économique. Cela augmente les risques de contamination de la maladie dans la ville.

Références bibliographiques

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DIOMANDE Béh Ibrahim, DIBI Pauline Agoh Kangah, YAO N’Guessan Beauséjour,2016, Variabilité climatique et mutations des méthodes et techniques culturales dans la région de Gbêkê au centre-nord de la Côte d’Ivoire, Revue de géographie du laboratoire Leïdi, N°14, pp 144-156

DIOMANDE Béh Ibrahim, COULIBALY Kolotioloma Alama, SOUMAHORO Saï Pou, 2017, Variabilité climatique et recrudescence du paludisme à Niangon dans la commune de Yopougon-Abidjan (Côte d’Ivoire), Revue ivoirienne de géographie des savanes, N°3, 18p.

THIBAUDON Michelle, OLIVIER Gille, 2007, Pollinoses et surveillance de pollens en Fance, France, Aire pure, N°71, 10p.

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Auteur(s)


1DIBY Kouakou Martin :Maître-Assistant ; Labo VST / LARESP – e-mail :dibi_martin@yahoo.fr – Institut de Géographie Tropicale / Université Félix Houphouët Boigny Cocody Abidjan

2Bosson Amédée KOUAME :Doctorant; e-mail:kouamebossonamedee@gmail.com – Laboratoire d’Hydro-Climatologie Télédétection et d’Environnement (LHCTE), Université Alassane Ouattara de Bouaké,

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