Effets de la dynamique du réseau de voirie sur la structuration de l’espace urbain métropolitain abidjanais.

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Kouamé Ferdinand N’ZI,  Sanaliou KAMAGATE, ALOKO N’guessan Jérôme

Résumé

Afin de montrer la contribution du réseau de voirie dans le processus de structuration de l’espace urbain à Abidjan, une étude a été menée dans le district métropolitain abidjanais sur les effets de la dynamique du réseau de voirie en lien avec la structuration de l’espace urbain à Abidjan. Une re-construction historique de la structure urbaine et une observation directe de terrain ont permis d’apprécier la question. En effet, plus d’un demi-siècle, après l’indépendance, le réseau viaire abidjanais a connu une réelle dynamique en lien avec la croissance de la structure urbaine de l’espace métropolitain abidjanais. Cependant, il connait aujourd’hui des difficultés liées à la pression démographique, à la surcharge du trafic sur le réseau viaire et à la détérioration de la voirie. Aussi va-til un impact sur l’organisation urbaine de l’espace métropolitain abidjanais. En définitive, notre étude a pu vérifier que d’importants investissements ont été consentis par l’Etat ivoirien, au profit du réseau de voirie dans le processus de mise en place de la structure urbaine de la ville. Cependant, ce réseau viaire structurant a un impact sur l’organisation urbaine de l’espace métropolitain abidjanais

Mots clés : Espace urbain, effets, dynamique, réseau de voirie, structuration

Abstract :

Key words:

INTRODUCTION

A Abidjan, au sein de l’espace métropolitain, grâce à d’importants investissements de l’Etat, plus de 211 millions d’euros soit environ 139 milliards de Frs CFA, ont été consentis pour améliorer la sécurité et la qualité de la voirie urbaine abidjanaise (Rapport ageroute, 2010, p2.). Ils ont permis la réalisation des principaux axes de circulation au sein de l’espace urbain abidjanais. Aussi, la voirie urbaine de l’espace métropolitain abidjanais reste-t-elle diversifiée, notamment des échangeurs, voies express, ponts, boulevards, voies d’intérêt national et communal. Ainsi, les mutations opérées par la structure urbaine, paraissent suivre la relative
dynamique de son réseau de voirie. Cependant, les constats faits, montrent une insuffisance de voies de communication due à la croissance démographique (de 1000 habitants en 1920, 500.000 habitants en 1970, 1.200.000 habitants en 2000, Abidjan comptait déjà 4.562.900 habitants en 2009 et plus de 6 millions d’habitants en 2014 (Estimations INS,2014) et aussi un accroissement du parc automobile, estimé à plus de 142.000 véhicules en circulation sur le réseau de voirie (Rapport bilan Ministère des Transports, 2010 p.6). L’importance du parc automobile abidjanais quant à la mobilité sur le réseau viaire, se situait à une proportion plus importante de véhicules personnels (74,2%) avec 114.424 véhicules, suivis de 14.689 camions soit (9,5%), 8200 taxis compteurs soit (5,3%) et 5.500 engins à deux roues motorisées soit (3,6%) du parc automobile (Rapport bilan Ministère des Transports, 2010p.6). Quant aux services privés de taxis collectifs qui exercent une part de marché du trafic, a plus que doublé en deux décennies. Elle est passée de 6% en 1988 à 17% en 1998 et à 36% en 2008. Aujourd’hui, cette part du marché des services privés de taxis collectifs, laisse présager une surcharge du réseau de voirie, vu son influence et le volume de véhicules, qui était estimé en
2010 à 5000 véhicules. Cette surcharge liée au trafic, le déplacement quotidien des populations des différentes communes environnantes vers la centralité et l’indiscipline des conducteurs, ont pour corollaire les nombreux engorgements et congestions (embouteillages) sur les voies urbaines. La détérioration de la voirie due au poids du trafic routier, la mise à niveau approximative de la voirie urbaine et les nombreux conflits fonciers, sont entre autres, autant de préoccupations que la réalité liée au réseau de voirie abidjanais présente. Il y a donc lieu de se demander comment le réseau de voirie contribue-t-il à la structuration de l’espace métropolitain abidjanais ? Et quels sont les effets induits du réseau viaire structurant sur l’organisation de l’espace urbain métropolitain ? Les réponses à ces interrogations, permettront d’apprécier la contribution du réseau de voirie à la structuration de l’espace urbain abidjanais.

1-Méthodologie

1.1 Cadre d’étude

Notre étude a porté sur l’espace du district métropolitain d’Abidjan, prenant en compte les (10) dix communes de l’espace urbain abidjanais. Le choix de ces communes (Tableau 1 : Choix des communes) a obéi à l’importance et à la variété des ouvrages et du niveau d’équipement mis en place dans chaque commune. Notre espace d’étude est situé sur un sol ferralitique avec une large auréole de sols fortement dénaturés. Le climat est de type tropical humide, avec une pluviométrie abondante et deux (2) saisons sèches. Une végétation appartenant au domaine guinéen, faite de forêts ombrophiles clairsemées par endroits. Il est occupé par une population cosmopolite et d’autochtones « ébriés ».

1.2 Matériels et méthodes

Le matériel et la méthode de notre étude reposent sur deux piliers essentiels. Tout d‘abord, nous avons fait le choix d’une approche diachronique, afin de mieux cerner les dynamiques de croissance de l’espace urbain abidjanais. Cette première approche s’est faite à travers le processus de reconstruction historique du tissu urbain abidjanais, en lien avec la dynamique de réseau de voirie ; ce qui a constituée l’un des axes majeurs de pensée de notre méthodologie. Enfin une observation directe, pour s’approprier notre terrain d’enquête.

PCNES : Pôle Communal d’un niveau d’équipement supérieur
PCNEM : Pôle Communal d’un niveau d’équipement Moyen
PCNEF : Pôle Communal d’un niveau d’équipement Faible

1.3 Matrice de pensée méthodologique

Notre méthodologie prend appui sur l’approche dite de la « re-construction historique » du lieu comme une contribution à la compréhension de la structuration de l’espace urbain abidjanais, en lien avec la dynamique de son réseau de voirie. Elle intègre aussi la dimension historique et le devenir de l’espace métropolitain abidjanais. Rappelons que la ville a une histoire, qui s’exprime dans les rythmes et les périodes d’utilisation des lieux, qui favorisent ou non la co-présence et le lien social. Elle possède aussi un avenir dont la trame urbaine est perçue dans les mutations ou croissance de l’espace urbain. Cette approche par « la reconstruction
» est nécessaire à la compréhension de la structure actuelle de l’espace métropolitain abidjanais. Ainsi, pour aboutir aux résultats de notre étude, deux (2) techniques ont été utilisées, à savoir, l’observation directe du terrain et l’approche diachronique, qui vise la re-construction historique du tissu urbain abidjanais ; ce qui rends plus explicite la compréhension du processus de structuration de l’espace urbain. Aussi, afin d’appréhender les effets de la dynamique du réseau viaire sur la structuration de l’espace métropolitain abidjanais, une échelle prise au niveau de la ville, nous va-t-il permis de travailler sur les entités géographiques retenues, notamment : les différentes voies de communication ; l’habitat ; les activités humaines et les équipements.

2-Résultats

Pour la conduite de notre étude et suite au traitement des informations collectées, nous nous sommes proposé de présenter nos résultats en deux (2) parties. Chaque partie est ainsi, l’occasion de cerner au mieux, la contribution du réseau de voirie à la structuration de l’espace urbain abidjanais. Aussi, avons-nous abordé, dans un premier temps, comme point de départ de notre réflexion, le lien entre la dynamique dans le temps de la structure urbaine de l’espace métropolitain abidjanais et l’organisation du système de voirie. Cette approche vise à comprendre le processus de mise en place de la structure urbaine de l’espace métropolitain, à travers une re-construction historique du processus d’occupation spatiale de l’habitat urbain, des activités modernes et infrastructures économiques, en lien avec la dynamique spatiale du réseau de voirie. Enfin, voir dans une seconde partie, l’impact du réseau viaire structurant sur l’organisation urbaine de l’espace métropolitain abidjanais.

2.1 Lien entre la dynamique dans le temps de la structure urbaine Abidjanaise et l’organisation du système de voirie

2.1.1-Avant 1960

Dès 1926, les premiers instruments d’une politique de l’habitat à Abidjan seront mis en place par l’administration coloniale. Pour la gestion de cette politique, l’office des habitations économiques (ohe) sera créé. Le décret de 1949 en fixera les objectifs et le premier cadre général de production de logements économiques sera mis en oeuvre. C’est à partir du plan Badani, en 1948, que la structuration de l’espace urbain abidjanais prendra réellement appui sur cette politique de logements publics. Elle sera orientée par une voirie urbaine naissante. Les travaux d’aménagement pour cette voirie verront en 1940, la création d’un pont élévateur, puis la construction, d’un pont fixe, le pont Félix Houphouët Boigny, en 1958. Dès les années 1950, l’espace urbain abidjanais laisse ainsi apparaître un zoning fonctionnel, par le truchement de deux (2) zones d’influence (Carte1 : Principales voies urbaines à Abidjan, 1960-1975), d’où seront concentrées l’essentiel de la voirie et des activités humaines. La première zone plus au Sud, abrite le canal de Vridi (1950) et le Port d’Abidjan (1951). Plus au Nord, la seconde zone d’influence, présente une surface bâtie, estimée à environ 33.685 ha (sihci, 1952), qui se structure autour des communes du Plateau et d’Adjamé. Aussi, dès 1952, la Société Immobilière d’Habitation de Côte d’Ivoire (sihci), produira-t-elle près de 3750 logements à Abidjan. Cette première société fusionne avec la succi, créée en 1959. « Elle construisit dans les quartiers d’Adjamé et de Treichville, des immeubles et logements locatifs, pour les fonctionnaires et européens de la coopération » (Bernus, 1962 p.419). Les travaux d’aménagement sur le site du port d’Abidjan et du canal de vridi, constituent un bloc homogène, au voisinage du quartier de Treichville, où sont construites les premières rues et avenues de la ville. Elles représenteront l’essentiel de la voirie à cette époque. Ces premiers quartiers et ouvrages successifs seront les prémisses de l’habitat, de l’équipement et de la voirie urbaine à Abidjan.

2.1.2-Entre 1960-1980

Le plan étape en 1960, accélère et concrétise les directions données à la trame urbaine abidjanaise par le plan Badanien 1948. Il accorde une plus grande importance à l’activité résidentielle. Il prévoit le développement et l’implantation de programmes d’habitats économiques sur le plateau du Banco, à Cocody et à la Riviera. Ce plan consolide l’évolution de la structure urbaine de la ville d’Abidjan. Ainsi, dès les années 1960, l’État ivoirien va redéfinir sa politique de logement. Pour réaliser ces objectifs, la mise à la disposition de sociétés immobilières, de terrains viabilisés, à titre gracieux et une gratuité totale des voies de circulation et réseaux divers, primaires et secondaires. Ensuite, l’octroi d’un fonds de démarrage par l’Office de Soutien de l’Habitat Économique (oshe). Le plan (aura) en 1969 et le plan directeur de 1974, permettront les réalisations de logements de la sicogi (1964). « Cette extension de l’habitat à Abidjan sera accompagnée d’une différenciation socio-économique des différents quartiers » (P.Haeringer, 1969,p.111-112). Entre 1960 et 1970, la production de logements économiques est évaluée à 5000 unités, (sicogi et sogephia, 1973). Elle est essentiellement localisée dans les quartiers centraux d’Adjamé, de Marcory et de Cocody. Aussi, la période de 1970 à 1980 est-elle, celle des grandes opérations immobilières des deux sociétés publiques. Elles sont réalisées dans les quartiers périphériques d’Abobo, de Williamsville, de Riviéra, de Port-Bouet et surtout de Yopougon. Plus de 40.000 logements économiques seront construits au cours de cette période, avec le début de réalisation de sites industriels de Koumassi et de Yopougon. Les années 1970, verront l’organisation de la voirie abidjanaise autour de deux axes diamétralement opposés, Ouest-Est/Nord-Sud, sur lesquels vont se greffer les ramifications secondaires vers le littoral et l’hinterland. L’extension de la capitale, va donc bénéficier de la réalisation des principales voies de circulation, rapides et diversifiées notamment : l’autoroute du Sud (à Treichville), le boulevard lagunaire, la rocade, la corniche, l’autoroute du Nord (traversant Yopougon), l’autoroute de l’Est (àAbobo) et l’échangeur de l’Indénié (à Adjamé).En plus du pont Félix Houphouët Boigny en1958, un second pont en 1972, franchit désormais la lagune Ebrié, le pont Général De Gaulle(Carte1 : Principales voies urbaines à Abidjan, 1960-1975).

2.1.3-De 1980 à 2002

Dès les années 1980, les difficultés économiques que va connaître la Côte d’Ivoire, suite à la chute des prix de ses principales matières premières, les investissements au profit de l’habitat et des infrastructures routières à Abidjan, vont connaitre une baisse, d’où un ralentissement de la production de logements et la création de nouvelles voies de communication. Mais, malgré la crise, les sociétés immobilières publiques, (sicogi et sogephia) vont produire 35.111 unités de logement en 1990, dont 25.069 pour la sicogi, soit 51,6 %, en logements économiques (sicogi, 1990). La sogephia, quant elle, produira 29.100 unités de logements urbains dont la
majorité à Abidjan, soit 26.269 unités (sogephia, 1990).

Tous ces logements répartis dans les différentes communes, vont fixer le niveau et la qualité du développement résidentiel à Abidjan. Aussi, face à cette récession économique, l’insuffisance de voies de circulation, pour la mobilité des différents moyens de transport sur les différents axes, seront perceptibles à cette période. La voirie interne comprendra pour l’essentiel les autoroutes du Nord (vers Yopougon) ; de l’Est (vers Abobo) et les boulevards Valérie Giscard d’Estaing et de Marseille (à Treichville). La décennie 1990 à 2000, du fait de la crise économique et des contestations socio-politiques, mettront de plus en berne les investissements de l’Etat au profit du réseau viaire abidjanais. Cependant, à la suite des élections de 2000, l’appareil étatique va relancer la mise à niveau d’infrastructures routières, notamment la construction de nouvelles voies à Abidjan. Le réseau viaire connaitra, une nouvelle vitalité dans sa dynamique et va reprendre son rôle de guide au profit avec de l’étalement de la structure urbaine à Abidjan.

2.1.4 Entre 2002-2010

Après les années 2000, l’espace métropolitain abidjanais dispose encore, en terme quantitatif de linéaire de voies, en terre ou revêtue ; traduisant ainsi une spatialité non négligeable bonne du revêtement du réseau de voirie à Abidjan (Tableau 2 : Détail quantitatif du linéaire de voirie à Abidjan).

Certaines communes disposent en cette période, d’une proportion importante en linéaire de voies en terre ou revêtu, à savoir Yopougon avec 451,5 km² (38,46 %), Cocody 134,7 km (11,47%); Koumassi 126,8 km² (10,80%) et Abobo 125,4 km² (10,68%).Par contre, cette période verra une décennie de crises socio-politiques successives, qui mettra en mal l’existant. Faute d’investissements au profit de la mise à niveau ou de la création de nouvelles voies, elles vont se détériorer progressivement. La production de logements par l’Etat et le secteur privé sera en baisse au cours de cette période de crises. 2.1.5-De 2010 à nos jours
A partir de 2010, le constat lié à la croissance de l’habitat à Abidjan, est celui d’une refonte de la politique de l’habitat, vu l’arrêt des investissements au profit de la création de logements et d’infrastructures routières, au cours de la précédente décennie. Cette longue période de crises a mis en veilleuse les initiatives étatiques dans ces secteurs. Aussi, l’état de détérioration de la voirie urbaine à Abidjan va-t-elle s’accentuer durant cette période. Mais, après la crise post-électorale de 2010, un élan de reprise économiques va permettre à l’Etat de relancer les activités d’aménagement, avec une nouvelle politique de l’habitat, et la mise à niveau du réseau de voirie fortement dégradé. Un programme gouvernemental de construction de « logements sociaux », et la création de nouvelles voies urbaines seront mis en oeuvre, avec l’appui des banques et sociétés immobilières accréditées. La trame urbaine en sera bénéficiaire avec une nouvelle configuration viaire en perspective, à travers la construction de voies express, de ponts et de logements à Abidjan.

2.2- Impact du réseau viaire structurant sur l’organisation urbaine de l’espace métropolitain Abidjanais

2.2.1-Impact socio-économique et environnemental du réseau viaire

Les effets produits par le réseau de viaire sont surtout d’ordre socio-économique et environnemental. Ce sont déjà plus de 211 millions d’euros soit environ 139 milliards de Frs CFA, investis pour améliorer la sécurité et la qualité de la voirie (Rapport ageroute, 2010 p.2). Ces investissements visent la création de nouvelles voies à Abidjan, pour une nouvelle configuration de l’espace urbain. Elles participent ainsi à la dynamique de la structure urbaine de l’espace métropolitain. L’impact environnemental reste cependant lié aux émissions de gaz, par les nombreux moyens de transport circulant sur le réseau viaire. Pour la plupart vieillissants et en mauvais état, ils polluent considérablement l’environnement urbain. Il est évalué à 64 millions de tonnes les émissions de gaz carbonique (CO2) dues à la mobilité urbaine, soit près de la moitié des émissions des transports. (Rapport, ESI, Konaté Idris Katié, ENSTP, 2010, p.24). La circulation urbaine à Abidjan est donc pour une part importante, responsable de la pollution de l’air. Au-delà des enjeux globaux, les émissions de gaz ont des impacts directs sur la santé publique et la qualité de vie des populations au sein de l’espace métropolitain abidjanais.

2.2.2-Impact lié aux contraintes du trafic routier à Abidjan

Le trafic actuel sur le réseau de voirie à Abidjan n’est que le reflet des constats faits par rapport aux contraintes de circulation sur ledit réseau. Ce sont en autres, la pression démographique, l’insuffisance des voies de communication, leur état de dégradation avancée de la voirie, un parc automobile croissant (142.000 véhicules en circulation -Rapport bilan Ministère des Transports, 2010 p.6), l’indiscipline des usagers et la surcharge des voies urbaines. Elles expliquent les difficultés de circulation et les nombreuses congestions observées sur les voies urbaines à Abidjan (Photo1 : Congestion de voie à Abidjan). Le réseau de voirie abidjanais dans sa grande partie est vieux d’un demi-siècle. Les premières voies datent des années 1950. Aussi, faut-il noter, que les activités d’entretien et d’aménagement restent coûteuses. Mais, les négliger ne peut qu’accélérer la détérioration du réseau de voirie abidjanais. Le marquage des routes fortement dégradées, concerne les 1/3 de de la voirie abidjanais (Rapport d’étude S2IC-ARC Ingénierie, de l’ageroute, 2010, p.15). La spatialité de cette détérioration de la voirie urbaine gagne progressivement l’ensemble du
réseau de voirie abidjanais. Ce qui constitue l’une des limites à son extension. Ces contraintes affectent considérablement les activités humaines et impactent durablement l’étalement de la structure urbaine de l’espace métropolitain abidjanais.

3-Discussion

La discussion des résultats de notre étude comparativement à d’autres études similaires, laissent transparaître deux réflexions complémentaires, à savoir qu’il existe non seulement une articulation entre la formation du tissu urbain et le réseau viaire, mais aussi un impact du réseau viaire structurant sur l’organisation de l’espace urbain.

3.1-Articulation entre la formation du tissu urbain et le réseau viaire

Déjà, avant 1960, le zoning fonctionnel de l’espace métropolitain abidjanais est construit autour de deux zones d’influence ; un bloc homogène au Sud de la ville, fait d’infrastructures et d’équipements et au Nord, un bloc où se situent le centre administratif et la plupart de l’habitat urbain. La réalisation de grands axes de communication (autoroutes, boulevards, rocades, ponts, échangeurs, rues…) durant la décennie (1960-1970) va-t-elle densifier le réseau viaire. Une réalité que F. Leimdorfer (1999, p.51) souligne en ces termes : « l’Abidjan des années 1960-1970 a été structuré par le rapport binaire Plateau (ville administrative et centre des sièges sociaux) -Treichville-Adjamé (quartiers populaires) et par de grandes opérations d’aménagement, d’urbanisme et de logements sur l’ensemble de l’espace urbain ». La période allant de 1970 à 2000, nonobstant la crise des années 1980-1990, va connaître enregistrer de l’extension de la voirie abidjanaise, organisée autour de ces deux (2) grands zones d’influence. Aussi, les différents plans urbains successifs (plan Badani, 1948 ; plans étapes, 1960 ; plan d’urbanisme de l’aura, 1969 ; plan directeur de 1974) et les programmes de constructions immobilières(sicogi, 1964 ; sogephia, 1973), avec l’apport des différents axes de communication créés, sont-elles faciliter et guider la trame de la structure urbaine de Libreville (Gabon) par H.C.ENGO-Assoumou (2007 p.153), qui selon lui, les différentes structures urbaines en Afrique, à l’image de la ville de Libreville au Gabon, permettent de réfléchir sur la complexité des réalités de cette capitale, cela à partir de l’articulation entre les voies de circulation et la formation du tissu urbain, ce qu’il appelle « les autres éléments urbains ». Cette étude souligne aussi bien les rapports entre une certaine catégorie d’équipements publics, notamment la voirie urbaine et l’organisation d’une agglomération métropolitaine d’Afrique noire, à l’image de la capitale gabonaise, Libreville. Pour ce faire, notre étude a fait le même constat, à savoir que le réseau viaire au sein de l’espace métropolitain abidjanais établit fort bien, un lien qui articule et guide la création de zones d’habitation et des pôles d’activités humaines structurants. Ce rôle de guide à l’étalement du tissu urbain, témoigne naturellement de la croissance de la structure urbaine de l’espace urbain abidjanais. Il demeure un excellent indicateur, permettant, non seulement d’observer l’existence d’une diversité de voies de communication, qui participent à cette croissance de l’espace urbain, mais permettent d’appréhender l’effectivité de l’articulation qui existe bel et bien entre le réseau de voirie et la formation de la structure urbaine de l’espace métropolitain abidjanais.

3.2-L’impact du réseau viaire structurant sur l’organisation de l’espace urbain

La gestion de l’accroissement des déplacements quotidiens et celle de l’étalement urbain sans cesse croissant, présentent un impact certain du réseau viaire sur l’organisation de l’espace urbain. Une mise à niveau du réseau de voirie abidjanais fortement dégradé, participe non seulement à une durée de vie plus longue des infrastructures créées, mais surtout facile la fluidité du trafic interne et impacte positivement les activités humaines et le déplacement des personnes et des biens au sein de l’espace urbain. Mais, comme le soulignent dans leur étude, T. Tamo Tatiétsé et A.Bidja, (2001, p.6), un autre effet majeur du réseau viaire reste « la forte densité du trafic avec des pointes très élevées dans les principaux carrefours, l’engorgement du trafic consécutif aux embouteillages de plus en plus persistants »,rendent difficile l’étalement urbain. Aussi, le développement urbain, en lien avec le réseau d’infrastructures routières, reste-t-il indispensable pour l’étalement du tissu urbain. Il initie un nouveau rapport entre l’habitat et les voies urbaines. Ainsi, « l’urbanisation des populations n’est pas nouvelle, mais elle se poursuit et la ville ou plutôt l’espace urbain prend une place de plus en plus grande et devient presque omniprésent » (P. Haeringer, 1998, p.86). Et cette « transition urbaine » (M. Wiel, 1999, p.121), « alimentée par une croissance urbaine forte, se traduit par un redéploiement de la ville dans son périmètre » (M. Millot, 2003, p.18), à savoir une extension qui peut prendre différentes formes, selon différents contextes et différentes contraintes. Aussi, comme le souligne F.Choay « les réseaux (le réseau de voirie s’entend) deviennent alors les garants des interactions consubstantielles à l’espace urbain » (F.Choay,1998, p.90).L’auteur parle donc de «l’ère du branchement»(F. Choay, 1998, p.90), où le réseau viaire devient central pour toute question d’aménagement, en impactant positivement l’espace urbanisé.
En particulier, l’accessibilité des lieux devient un enjeu majeur pour les périphéries si elles veulent rester attractives. Ainsi, la nouvelle réalité urbaine se caractérise par un redéploiement géographique des espaces urbains où vivent les populations, en lien avec une augmentation des vitesses de déplacements, liée à l’étendue du réseau de voirie. Cet étalement s’accompagne d’une forte utilisation de moyens de déplacement sur la voirie viaire. Le réseau de voirie devient alors essentiel pour garantir l’accessibilité des espaces.

Conclusion

Après l’indépendance, la bonne santé de l’économie ivoirienne va impulser l’extension spatiale de la capitale abidjanaise. Elle verra au fil des décennies une densification de son réseau de voirie. Les grandes voies de desserte entre les différents quartiers et communes ont été créées à cette période. Une réelle mutation de la voirie urbaine abidjanaise s’est donc opérée durant les premières décennies après l’indépendance. On verra, la densification des activités humaines et la mise en oeuvre par l’Etat ivoirien d’une politique de l’habitat public, qui sera guidée par la création de nouvelles voies à Abidjan. Cependant, la croissance démographique, l’importance du parc automobile, le volume et la forte pression du trafic sur les infrastructures routières existantes, tendent à les dégrader progressivement. Aussi, cette réalité laisse-t-elle entrevoir de réels besoins de mise à niveau du réseau de voirie, qui durant des décennies, a eu un impact certain sur l’organisation de l’espace urbain. En définitive, le réseau de voirie abidjanais reste révélateur des logiques sociales et politiques productrices d’espace. Sur le plan spatial, la dynamique du réseau de voirie à Abidjan reste un excellent indicateur de croissance de la structure urbaine. Les investissements consentis ont considérablement participé et impacté positivement la structure urbaine de la ville. Les aménagements futurs devront demeurer en étroite relation avec la dynamique spatiale de la structure urbaine et en lien avec l’organisation du système de voirie au sein de l’espace métropolitain abidjanais.

Références bibliographiques

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Auteur(s)


1Kouamé Ferdinand N’ZI: Doctorant; e-mail : nzikouame610@gmail.com

2 Sanaliou KAMAGATE: Maître-Assistant; e-mail: ksanaliou@yahoo.fr – Laboratoire de Recherches Espaces-Systèmes et Prospective

2 ALOKO N’guessan Jérôme : Directeur de Recherches (CAMES); Institut de Géographie Tropicale, Université Félix Houphouët Boigny

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