Etude des facteurs d’utilisation des médicaments traditionnels chez la femme enceinte : cas des patientes du centre de sante urbain communautaire Henriette Konan Bédié (Cocody-Abidjan, Côte d’Ivoire)

Kouamé Yves Bory KOUAKOU Doctorant en Géographie kouakouyvesbory@yahoo.fr

Gnanké Mathieu NIAMKE Maître-Assistant mathieuniamke23@gmail.com

Université Félix Houphouët-Boigny (Côte d’Ivoire)

Résumé :

En Côte d’Ivoire, la promotion de la médecine traditionnelle a pour but essentiel de contribuer à l’amélioration de la couverture des besoins sanitaires de la population par une prise en compte effective et efficiente de la Médecine et de la Pharmacopée Traditionnelles dans le système national de santé. Une frange importante de la population, notamment les femmes en Consultation Prénatale (CPN), a fait l’objet de notre étude, en ce qui concerne la consommation des médicaments traditionnels. Malgré le renforcement du système sanitaire en matière de prise en charge des femmes enceintes, on observe bien de cas des femmes qui ont recours aux Médicaments Traditionnels (MT) pour le traitement et le suivi de leurs grossesses. L’étude vise à montrer les facteurs qui expliquent l’utilisation des médicaments traditionnels chez les femmes enceintes. Pour réaliser l’étude, nous avons mené la recherche documentaire, des observations de terrain et réalisé une enquête auprès de 68 femmes enceintes en consultation prénatale, à partir de la méthode de convenance. L’étude a fait ressortir que les femmes enceintes qui consomment les médicaments traditionnels ont un âge qui varie entre 21et 39 ans. Aussi, les résultats des enquêtes ont permis de présenter les raisons qui favorisent l’utilisation des médicaments traditionnels, notamment le coût faible de ces médicaments, la disponibilité, l’entretien de la grossesse, la confiance en ces médicaments. L’étude montre que 52% de femmes ont une connaissance des MT, 82% des femmes lient leur consommation des MT au coût jugé moins onéreux.

Mots clés : Blockhaus, Médicament traditionnel, Consultation Prénatale (CPN), femmes enceintes, santé.

Abstract

In Côte d’Ivoire, the promotion of traditional medicine has the essential aim of contributing to the improvement of the coverage of the health needs of the population by effective and efficient consideration of Traditional Medicine and Pharmacopoeia in the system. national health. A large segment of the population, in particular women in Prenatal Consultation (CPN), was the subject of our study, with regard to the consumption of traditional medicines. Despite the strengthening of the health system in the care of pregnant women, there are many cases of women who use Traditional Medicines (TM) for the treatment and monitoring of their pregnancies. The study aims to show the factors that explain the use of traditional medicines among pregnant women. To carry out the study, we conducted documentary research, field observations and carried out a survey of 68 pregnant women in prenatal consultation, using the convenience method. The study revealed that pregnant women who consume traditional medicines have an age that varies between 21 and 39 years. Also, the results of the surveys made it possible to present the reasons which favor the use of traditional medicines, in particular the low cost of these medicines, the availability, the maintenance of the pregnancy, the confidence in these medicines. The study shows that 52% of women have knowledge of TMs, 82% of women link their consumption of TMs to the cost deemed less expensive.

Keywords: Blockhaus, Traditional medicine, Prenatal Consultation (CPN), pregnant women, health.

Introduction

Pendant la dernière décennie, le recours à la médecine traditionnelle a connu un regain d’attention et d’intérêt dans le monde (OMS, 2003, p. 1). C’est pourquoi, l’OMS en tant qu’institution leader en matière de santé, a recommandé dans sa stratégie pour la médecine traditionnelle, pour la période 2014-2023, d’aider les responsables de la santé à développer des solutions qui participent d’une vision plus large favorisant l’amélioration de la santé et l’autonomie des patients (WHO, 2021, p. 8).

Ainsi, de nombreux pays en Afrique ont mis en place des dynamiques de reconnaissance de la médecine traditionnelle et de ses praticiens (D. Pierrine, 2016, p. 3). En Côte d’Ivoire, la médecine traditionnelle connaît également depuis quelques années un regain d’intérêt et occupe une place importante dans la politique sanitaire. Environ 80% de la population surtout en milieu rural a souvent recours à elle comme alternative aux problèmes d’accessibilité aux soins et aux médicaments de la médecine moderne (Programme National de Promotion de la Médecine Traditionnelle, 2014, p. 8).

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (2016), toute femme enceinte doit recevoir des soins de qualité tout au long de la grossesse, de l’accouchement et de la période postnatale. En effet, les soins prénatals (SPN) constituent une plateforme pour fournir d’importantes prestations de santé, dont la promotion de la santé, le dépistage, le diagnostic et la prévention des maladies (OMS, 2016, p. 11). Aussi, les soins prénatals sont essentiels car ils permettent aux intervenants d’offrir aux femmes enceintes une prise en charge, un soutien et des informations, notamment de favoriser l’adoption d’un mode de vie sain, y compris une bonne nutrition, de détecter et de prévenir des maladies.

En Côte d’Ivoire, l’un des défis du système de santé est de rapprocher les populations des centres de santé, notamment au niveau des consultations prénatales, l’accouchement avec l’assistance d’un personnel de santé qualifié et le suivi après l’accouchement (Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique, 2020). Pour ce faire, le ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique, la Banque mondiale et l’UNFPA joignent leurs efforts pour améliorer la qualité des services liés à la santé de la reproduction en Côte d’Ivoire à travers le projet d’achat stratégique et d’harmonisation des financements et des compétences de santé (spark Heath) (cotedivoire.unfpa.org). Ces actions montrent que des efforts sont déployés pour un suivi des femmes dans les centres de santé en consultation prénatale.

Cependant, de nombreux constats relèvent qu’en dépit de ces actions, certaines femmes enceintes ont recours aux médicaments traditionnels pour le suivi de leur grossesse. En effet, le recours aux substances végétales, pour faciliter l’accouchement, a été rapporté par des études menées dans diverses localités de la Côte d’Ivoire, notamment à Agboville, à Abidjan (K. N’guessan, 2010, p. 2).

En Côte d’Ivoire, très peu de données sont disponibles sur les facteurs explicatifs d’utilisation des médicaments traditionnels chez la femme enceinte. Cependant, des constats et observations indiquent que les femmes enceintes dans le district d’Abidjan, utilisent les MT pendant la grossesse. Ainsi, cette étude vise à montrer les facteurs qui expliquent l’utilisation des médicaments traditionnels chez les femmes enceintes ayant recours à la Formation Sanitaire Urbaine à base Communautaire Henriette Konan Bédié (FSU-COM HKB), dans le village de blockhauss dans la commune de Cocody à Abidjan. La question qui se dégage est donc, quels sont les facteurs qui expliquent l’utilisation des médicaments traditionnels chez la femme enceinte ? De façon spécifique, il s’agira dans cette étude de, décrire les raisons de l’utilisation des MT, identifier les médicaments traditionnels utilisés et les pratiques des femmes enceintes. Des constats manquent sur la ville d’Abidjan et particulièrement la zone étudiée.

1.  Méthodologie

1.1.  Présentation de la zone d’étude

Situé dans la commune de Cocody, le village de blockhauss fait partie des villages intégrés à la ville d’Abidjan. Il est séparé de Marcory- Résidentiel par la lagune Ebrié au Sud, par le quartier de Cocody-Ambassade, à l’est par le Sofitel Hôtel Ivoire. Le village abrite le FSU-COM HKB, où est logé le service de gynécologie, qui dispose de trois salles : la première correspond à la salle d’attente, la seconde pour la prise des constantes, assurée par les aides-soignantes et stagiaires et la troisième pour les consultations et conseils est tenue par les médecins- gynécologues et les sages-femmes. La carte 1, indique la localisation de la Formation Sanitaire Urbaine Communautaire Henriette Konan Bédié (FSU-COM HKB).

Carte 1 : Localisation de la FSU-COM HKB de Blockhauss

1.2.  Techniques de collecte de données

Les Techniques retenues sont essentiellement basées sur la recherche documentaire et l’enquête de terrain pour aboutir aux traitements des données. La recherche documentaire s’est organisée autour de la compréhension des études sur les facteurs favorisant l’utilisation des médicaments traditionnels. En ce qui concerne l’enquête de terrain, elle a consisté à interroger la population

cible constituée de femmes enceintes. Ne disposant pas de base de sondage, nous avons opté pour l’échantillonnage par convenance, en choisissant le FSU-COM, pour enquêter les femmes enceintes venues en consultation prénatale, selon notre période indiquée. Ainsi, un échantillon de 68 patientes a été enquêté. L’enquête s’est déroulée du 8 septembre au 23 septembre 2019, tous les jours ouvrés.

Ici on a 2 grands acteurs : les femmes enceintes et les tradipraticiens ou vendeurs de médicaments traditionnels (Guérisseurs, vendeurs simples, herboristes, etc)

Des entretiens sont nécessaires auprès des sources d’approvisionnement en médicaments traditionnels en vue de bien comprendre l’utilité des produits. Cet aspect reste à revoir

En ce qui concerne le traitement des données, nous avions procédé par un traitement statistique, avec l’utilisation d’office Excel et de sphinx version 5, pour la suite réaliser des graphiques et tableaux.

2.  Résultats

2.1.  Les raisons de l’utilisation des MT

2.1.1.     De divers motifs d’utilisation des MT par les femmes enceintes selon les recommandations

Les enquêtes menées auprès des femmes enceintes venues se faire consulter dans le FSU-COM HKB, ont permis de relever que les patientes utilisent les MT, pour diverses raisons selon les recommandations des trois entités suivantes : les tradipraticiens ou vendeurs, le personnel et la famille. En effet, les 68 femmes enceintes, qui ont été soumises au questionnaire de l’étude, ont déclaré avoir fait le choix de l’utilisation des MT pendant la période de grossesse, selon les informations reçues soit au niveau de la cellule familiale, notamment auprès d’un parent ou des tradipraticiens. Le tableau 1, ci-dessous montre la répartition des femmes en fonction de la source d’information, conduisant à l’utilisation des MT.

Tableau 1 : Répartition des patientes utilisant les MT selon les sources d’informations

Source d’informationEffectifPourcentage
Tradipraticiens ou vendeurs1319%
Personnel0609%
Famille4972%
Total68100

Source : Enquête de terrain, Kouakou, 2019

L’analyse du tableau n°1, montre que 72% des femmes consomment les MT, sur les recommandations de la famille. Cela s’explique par le fait, que la famille constitue la première entité sociale a recommandé l’utilisation des MT, pour faire le traitement et le suivi de la grossesse. L’enquête a relevé que les tradipraticiens ou vendeurs constituent la seconde entité, par qui, les femmes reçoivent l’information de l’utilisation des MT, pour un suivi de leur état de grossesse.

2.1.2.  Utilisation des MT, comme moyen d’entretien prénatal

Plusieurs raisons expliquent le recours des femmes aux médicaments traditionnels, notamment pour un meilleur suivi de la grossesse et surtout pour traiter certaines maladies comme les ronronnements de ventre et les hémorroïdes. La figure 1 ci-dessous traduit le résultat indiqué, mais elle met en évidence les proportions des facteurs de maladies et d’entretiens de la grossesse.

Figure 1 : Répartition des femmes enceintes en fonction des facteurs de consommation des MT.

Source : Enquête Kouakou, 2019

L’analyse de la figure 1 montre que les femmes qui viennent en consultation prénatale que nous avons enquêté, estiment dans l’ensemble que les maladies et l’entretien de la grossesse sont les causes majeures de l’utilisation des médicaments traditionnels avec une proportion de 89%. Ce résultat est rattaché également à la consommation directe de médicaments traditionnels, en y associant d’autres facteurs, tels que les pratiques coutumières, les croyances etc. A cet effet une femme enceinte enquêtée de 31 ans a déclaré que : « les médicaments traditionnels sont efficaces pour entretenir la grossesse et nous protéger contre les mauvais esprits ».

2.1.3.  De la prise en compte de l’âge dans l’analyse des motifs de l’utilisation des MT

Au cours de l’enquête, la variable âge a été importante dans la prise en compte de l’analyse du phénomène. Cette répartition selon l’âge, permet d’identifier la tranche d’âge qui utilise le plus les MT, pendant la période de grossesse. C’est une modalité de la variable « les raisons de l’utilisation des MT ». L’âge a été un indicateur important pour l’étude, car cela a permis de relever que l’utilisation des MT, est motivée par les entités indiquées plus haut, mais aussi l’utilisation est liée à la maturé de la femme. Comme l’a indiqué dame A.Y : « Je suis mature et je peux décider moi-même, d’utiliser les médicaments traditionnels pour suivre ma grossesse progressivement ». Comme le montre nos résultats, la tranche d’âge des enquêtées est comprise entre 21 et 39 ans et la proportion la plus importante est constituée des femmes de 28 ans. Toutes les enquêtées ont plus de 18 ans. La tranche de 39 ans, constitue la proportion la plus faible. La figure 2, ci-dessous présente la répartition des patientes selon l’âge.

Figure 2 : Répartition des patientes selon l’âge

Source : Enquête Kouakou, 2019

2.2.  Connaissance et médicaments traditionnels utilisés par les femmes

2.2.1.  Connaissances des Médicaments Traditionnels (MT) et lieu de résidence des femmes enquêtées

Les médicaments traditionnels ne sont pas méconnus chez les femmes enceintes interrogées. En effet, quel que soit l’âge et/ou le statut professionnel des enquêtées (ménagères 32%, étudiantes 28%, commerçantes 19%, et fonctionnaires 21%) les femmes ont indiqué à 82% avoir connaissance des médicaments traditionnels. L’étude a relevé que quel que soit le statut professionnel, les femmes ont montré qu’elles ont connaissance que les médicaments traditionnels sont utilisés par de nombreuses femmes pendant la période de grossesse. Les tableaux 2 et 3, ci-dessous présentent respectivement la répartition des patients selon leurs connaissances des médicaments et la répartition des patientes reçues en CNP, selon le lieu de résidence.

Tableau 2 : Répartition des patientes selon leurs connaissances des médicaments traditionnels

Connaissances des médicaments traditionnelsEffectifPourcentage
Oui5682%
Non1218%
Total68100

Source : Enquête Kouakou, 2019

Le tableau 2, indique que 82% des femmes ont une connaissance du médicament traditionnel. C’est en quelque sorte cette assurance dans la pratique, qui détermine l’utilisation des MT par les femmes enceintes. Les femmes interrogées qui viennent en consultation prénatale dans la FSU-Com-HKB, proviennent principalement de la commune de Cocody, comme l’indique le tableau 3 ci-dessous.

Tableau 3 : Répartition des patientes reçues en CPN selon le lieu de résidence

RésidenceFréquencePourcentage
Blockauss4871%
Saint-Jean1218%
Cocody-2 Plateaux0304%
Palmeraie0507%
Total68100

Source : Enquête de terrain, Kouakou, 2020

Le tableau 3, indique la répartition des patientes reçues en CPN selon le lieu de résidence. Il ressort que les femmes qui fréquentent le Centre de santé urbain communautaire Henriette Konan Bédié (Cocody-Abidjan), proviennent des quartiers de la commune de Cocody. La proportion des femmes la plus importante, est celle résidente à Blockauss avec 71%.

2.2.2.  Une variété de MT utilisés par les femmes en situation de grossesse

Une diversité de médicaments traditionnels est consommée par les femmes pendant leur grossesse. Tous les médicaments sont utilisés par les femmes sous conseils des vendeuses et des personnes ressources qui ont conseillé leurs utilisations. Au cours de l’enquête, une diversité de médicaments a été listée par les femmes avec des noms particuliers. Pour une meilleure appréciation, observons le tableau 4, ci-dessous.

Tableau 4 : Identification de quelques médicaments traditionnels utilisés par les femmes enceintes

Source : Enquête, Kouakou 2019

Les femmes enceintes utilisent des décoctions en boisson ou en lavement généralement pour le traitement de la constipation ou du paludisme. On note que les femmes enquêtées utilisent une variété de médicaments traditionnels avec pour préférence la solution pour lavement interne et externe (79%). En plus de la solution beaucoup prisée, il y a les médicaments frais avec 68% d’utilisation, les tiges, racines ou feuilles pour la purge, qui sont consommés à 57%, la décoction, infusion de racine (boisson) avec 54%. Cette recherche a mis en évidence les médicaments utilisés par les femmes pendant la grossesse et n’a mis l’accent particulièrement sur la ou les maladies traitées par chaque médicament. Mais, néanmoins, il est ressorti au cours de nos échanges avec certaines femmes, que le médicament de bobodouman est utilisé pour traiter les infections du bas-ventre. Aussi, les décoctions, infusions de feuilles sont utilisées pour traiter les vomissements, les nausées, les pieds qui s’enflent et surtout le paludisme.

2.3.  Pratiques et perceptions liées à l’utilisation des MT par les femmes enceintes

2.3.1.  Fréquence de consommation des médicaments traditionnels (MT) chez les femmes

Dans le processus de consommation des MT, les femmes sont guidées par des prises régulières selon les instructions de la vendeuse ou de personnes ressources. Ainsi, selon les statistiques indiquées sur la figure 3, ci-dessous, on peut apprécier diverses fréquences de prises de médicaments traditionnels chez les femmes. Il ressort dans l’ensemble que la prise de médicaments traditionnels obéit à un temps indiqué.

Source : Enquête Kouakou, 2019

2.3.2.  Perception des femmes enceintes liées à l’utilisation des médicaments

L’étude s’est intéressée à la perception des femmes enceintes, quant à l’efficacité des produis traditionnels consommés. Ainsi, trois variables ont été retenues pour l’étude, notamment ; amélioration de l’état de santé, pas d’amélioration de l’état de santé, aucune idée ont permis de faire une analyse significative entre la consommation des médicaments et l’état de santé des femmes. Le tableau 5 ci-dessous, présente les impressions sur l’évolution de l’état de santé liée à la consommation des médicaments traditionnels.

Tableau 5 : Impressions sur l’évolution de l’état de santé liée à la consommation des médicaments traditionnels

ImpressionEffectifPourcentage
Amélioration de l’état de santé5885%
Pas d’amélioration de l’état de santé406%
Aucune idée609%
Total68100

Source : Enquête, Kouakou 20219.

L’analyse du tableau n°5, indique que 85% des femmes qui utilisent les MT, affirment une amélioration de l’état de leur santé. Elles expliquent cette situation d’amélioration de leur santé, en se référant à leur état de santé (situation de maladie) avant la prise des médicaments et l’amélioration observée pendant les prises de médicaments. Elles déclarent que les médicaments contribuent à améliorer leur état de santé non seulement lorsqu’elles présentent un malaise ou des douleurs, mais surtout lorsqu’elles contractent le paludisme et la fatigue.

3.  Discussion

L’étude a permis de mettre en évidence les motifs de la consommation des médicaments traditionnels par les femmes enceintes, on note que 72% des femmes consomment les MT, sur les recommandations de la famille. Les recherches réalisées par B. Kande et al. (2018, p. 5), avaient montré, que sur les 125 patients inclus dans l’étude, 88% avaient eu recours à la médecine traditionnelle les 12 derniers mois précédent l’enquête. Il ressort donc l’importance du taux d’utilisation des médicaments traditionnels, que notre étude a également relevé.

L’étude a montré que les femmes qui viennent en consultation prénatale que nous avons enquêté, estiment dans l’ensemble que les maladies et l’entretien de la grossesse sont les causes majeures de l’utilisation des médicaments traditionnels avec une proportion de 89%. Ce résultat est rattaché également à la consommation directe de médicaments traditionnels, en y associant d’autres facteurs, tels que les pratiques coutumières, les croyances etc. Dans le même ordre d’idée, l’Organisation Ouest-Africaine de la Santé (OOAS, 2013, p. 5), avait montré aussi que les plantes médicinales constituent une ressource vitale susceptible d’être mobilisée pour son intérêt tant sanitaire que socio-économique.

Notre étude a montré que 82% des femmes ont une connaissance du médicament traditionnel. Dans leurs travaux de recherches, A. C. Founzégué et al. (2020, p. 13), avaient montré que la population du Département d’Oumé avait une connaissance des soins prénataux à base de plantes médicinales. Sur les 104 personnes interviewées, la majorité (88,46%) étaient des femmes. Ce résultat pourrait s’expliquer par le fait que ce sont les femmes qui font la maternité.

La fréquence de prise des MT, par les femmes a été abordée dans l’étude de B. Kande et al. (2018, p. 13224). En effet, pour les auteurs, la majeure partie des patients (52%) ayant eu recours à la phytothérapie ont déclaré avoir consommé deux fois par jour les remèdes à base de plantes. Par contre, 31,20% ont consommé les remèdes trois fois par jour. Les patients ont consommé l’équivalent d’un verre de 35 cl à chaque prise dans la grande majorité des cas (59,32%). Ces résultats, ont été montré également dans notre étude.

Conclusion

Il ressort de cette étude que les médicaments traditionnels sont connus des femmes enceintes. Ils sont consommés pour des raisons d’entretien de la grossesse, pour traiter certaines maladies et contribuent à amélioration de leur état de santé. Les femmes enceintes utilisent plusieurs types de plantes, notamment pour des décoctions en boisson ou en lavement généralement pour le traitement de la constipation, vomissement, nausée ou du paludisme. Pour éviter les complications liées à l’utilisation des MT, pendant la grossesse, un encadrement des acteurs dans le domaine des MT, une sensibilisation sur les dangers et abus des MT, peut contribuer résolument à un suivi mixte des femmes pendant la grossesse.

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