Evolution spatio-temporelle de la Forêt classée d’Anguededou, une des dernières reliques forestières de la ville d’Abidjan dans le Sud-ouest de la Côte d’Ivoire

Yapo Menin Anicet Durand-Claude OBOUE, Doctorant, obouedurani@gmail.com

Kouadio Eugène KONAN Maitre de Conférences enzokkeugene@yahoo.fr

Université Félix Houphouët Boigny

Résumé :

La forêt classée d’Anguédédou est l’une des dernières reliques forestières périurbaines de la ville d’Abidjan. Erigée en forêt classée par l’administration coloniale en 1930, elle est aujourd’hui gérée par la Société de Développement des Forêts (SODEFOR). Sa végétation appartient au domaine de la forêt avec un climat subéquatorial et une pluviométrie abondante pouvant atteindre en moyenne 1440 millimètres par an. La présente étude se propose de caractériser les formations végétales à l’aide d’une classification supervisée au travers de la télédétection et des SIG. Spécifiquement, l’étude vise à analyser l’état de l’occupation du sol de la forêt. L’atteinte de l’objectif a nécessité le recours aux données telles que des images Landsat TM, ETM+ et OLI, des données cartographiques et de terrain. L’analyse de la végétation montre qu’en 2020, la forêt classée d’Anguédédou était constituée de 35% de forêt contre 58 % en 2000. La forêt a donc connu une régression au cours des 20 dernières années. En 2020, les sols nus représentaient 30% contre 22% en 2000. Au cours de cette période, les sols nus ont gagné en superficie. Les cultures vivrières repressentaient 24% en 2020 tandis qu’en 2000 elles étaient de 9%. Les superficies occupées par les cultures vivrières ont enregistré une importante augmentation. Les plantations d’hévéa n’ont pas enregistré d’évolution en termes de superficie. Elles sont restées plutôt constantes avec 11% de couverture aussi bien en 2000 qu’en 2020.

Mots Clés : Côte d’Ivoire – Anguédédou Forêt périurbaine – Télédétection – SIG

Abstract

The classified forest of Anguédédou is one of the last peri-urban forest relics of the city of Abidjan. Erected in a forest classified by the colonial administration in 1930, it is now managed by the Société de Développement des Forêts (SODEFOR). Its vegetation belongs to the domain of the forest with an Attiéen climate and an abundant rainfall that can reach an average of 1440 millimeters per year. The study proposes to characterize plant formations using supervised classification, remote sensing and GIS. Specifically, the study aims to analyze the state of forest land use. Achieving the goal required the use of data such as Landsat TM, ETM+ and OLI images, map data and field data. The analysis of the vegetation shows that in 2020 the classified forest of the Anguédédou was made up of 35% of forest against 58% in 2000. As a result, the forest has declined over the past 20 years. In 2020, bare soils accounted for 30% compared to 22% in 2000. During this period, bare soils gained in area. Food crops repressed 24% in 2020 while in 2000 they were 9%. The area occupied by food crops recorded a significant increase. Rubber plantations did not change in terms of area. Their areas remained constant with 11% coverage in 2020 as well as in 2000.

Keywords : Ivory Coast – Anguededou – Peri-urban forest – Remote sensing – GIS

Introduction

Les écosystèmes forestiers restent indispensables à la suivie de l’humanité. Ils fournissent à l’homme de nombreux services de production de bois et de produits ligneux. Ils favorisent le développement d’activités récréatives et améliorent la qualité des eaux (A. Fruleux, 2017, p. 3). Dans le monde, les forêts tropicales couvrent plus de deux milliards d’hectares et sont très importantes pour la santé de la planète. L’Afrique Centrale à elle seule représente le second plus grand massif de forêt tropicale humide au monde, soit près de 30% de la couverture forestière (G. Viennois, 2011, p.4). Les forêts du monde contiennent jusqu’à 80% de l’ensemble du carbone présent au-dessus de la surface du sol et environ 40% du carbone terrestre souterrain (sol, litière et racines) (FAO, 1997).

En 1900, la Côte d’Ivoire, disposait d’une couverture forestière d’environ 16 millions d’hectares. Le pays a connu un recul considérable de sa forêt, passant de 7,8 millions en 1990 à 3,4 millions d’hectares en 2015. C’est environ 200 000 hectares de forêt que le pays perd chaque année (Ministère des Eaux et Forêts, 2018, p.7). La forêt classée d’Anguédédou est perçue comme l’une des dernières reliques de la ville d’Abidjan. Sa délimitation et son bornage ont été réalisés entre 1943 et 1953 par l’administration coloniale et couvre une superficie d’environ 8447,47 hectares (P. A. Yéo et Y. C. Amani, 2016, p.42). De même que le parc national du Banco, la forêt classée d’Anguédédou représente un des poumons de la ville d’Abidjan pour son rôle de régulateur climatique, d’oxygénateur de l’air ou de réducteur de la pollution atmosphérique par la production d’oxygène favorable à la réduction de Gaz à Effet de Serre (GES). Aussi, la forêt d’Anguédédou participe -t-elle à la protection de l’une des plus importantes sources aquifères qui alimentent les populations de la ville d’Abidjan en eau potable (P. A. Yéo et Y. C. Amani, 2016, p.42). Cependant, cette forêt marque une forte présence humaine. En effet, l’occupation agricole dans la forêt classée d’Anguédédou s’est fait soit par des concessions légales d’environ 2185 ha, des occupations sur attribution ou autorisation estimées à 54 ha et de 417 ha d’occupation spontanée. L’occupation de cette forêt sert à des fins de pratiques agricoles, d’urbanisation et de fermes avicoles. Du fait de la forte pression démographique, la forêt a connu 05 déclassements lui faisant perdre 88% de sa superficie originale (R. K. Oura, 2012, p.14).

Alors que la forêt périurbaine d’Anguédédou joue un rôle aussi indispensable dans la régulation des pluies et dans la séquestration du carbone, cette forêt est constamment infiltrée, fortement dégradée du fait des pressions anthropiques et urbaines et morcelée en plusieurs endroits de ses limites (R. K. Oura, 2012, p.14). A cet effet, il convient de savoir comment la forêt classée d’Anguédédou a-t-elle évolué de 1990 à 2020 ?

La présente étude a pour objectif d’analyser l’évolution de la couverture forestière d’Anguédédou de 1990 à 2020. Spécifiquement, il s’agit d’établir l’état de l’occupation du sol de la forêt classée en 2020 et d’étudier la dynamique de l’évolution de l’occupation du sol de 1990 à 2020.

1-     La zone d’étude

La forêt classée d’Anguédédou est située au Nord-Ouest du district Autonome d’Abidjan. Elle est comprise entre 5°98 et 5°96 de latitude ouest et 3°76 et 3°73 de longitude nord (Carte 1). La forêt classée d’Anguédédou est traversée par l’autoroute du Nord reliant la capitale économique Abidjan à, Yamoussoukro, la capitale politique du pays. Cette forêt est limitée au Sud par la commune de Yopougon, à l’Est par le Parc National du Banco, au Nord par les communes d’Anyama et d’Abobo et au Sud-Ouest, par la commune de Songon.

Carte 1 : Localisation de la forêt classée d’Anguédédou

La superficie de la forêt classée d’Anguédédou est passée de 9148,76 ha en 2018 (République de Côte d’Ivoire, 2018, p.1) à 8501,49 ha en 2020 (République de Côte d’Ivoire, 2020, p.2).

La forêt s’étend sur un relief de plateau avec une altitude moyenne de 100 m. La forêt d’Anguédédou appartient au climat d’Abidjan qui est de type subéquatorial, chaud et humide, caractérisé par une pluviométrie élevée, de l’ordre de 2 000 mm/an et une température moyenne annuelle de 26°4, avec une amplitude très faible (3°3).

La population environnante de la forêt classée d’Anguédédou est passée selon les estimations de l’INS de 2 092 184 habitants en 1990 à 2 877 948 habitants en 2000 et en 2014 à 4 395 243 habitants.

2- Données et Méthodes

2.1- Données

La réalisation de la présente étude a eu recours à trois types de données. Il s’agit des données satellites, des données cartographiques et des données de terrain.

Les données satellites sont trois images Landsat de la scène 196/56. Il s’agit des images Landsat4 TM du 10/12/ 1990, Landsat 7 ETM+ du 15/02/ 2000 et Landsat 8 OLI du 16/01/ 2020. Le choix de ces images tient compte des saisonnalités afin de minimiser les couvertures nuageuses. Elles ont permis de mettre en relief la dynamique de l’occupation du sol sur une période de 30 ans et d’explorer de probables impacts des changements climatiques pour des études futures.

Les données cartographiques concernent la carte redéfinissant les limites de la forêt classée de l’Anguédégou à l’échelle 1/75 000 et la carte administrative de la Côte d’Ivoire réalisée à l’échelle 1/1 000 000, les deux étant réalisées par le BNETD/CCT.  Elles ont servi à la localisation de la forêt classée de l’Anguédédou, Ces données comprennent également des fichiers vecteur (routes et espaces bâtis), utilisées pour mesurer la pression humaine sur la forêt classée.

Les données de terrain sont constituées essentiellement de relevés GPS qui sont des points de géolocalisation des différents types d’occupation du sol. Ces données ont permis d’identifier les types d’occupation sur les images et surtout de valider les classifications effectuées.

2.2- Méthode

La méthodologie utilisée concilie, collecte et traitement des données obtenues et leur intégration dans un SIG.

2.2.1- Collecte des données

La collecte des données a nécessité des missions de terrain pour repérer et géolocaliser les types d’occupation du sol. Ces missions ont été faites suite au choix des classes à cartographier.

Les missions de terrain consistaient à faire des observations et à géolocaliser à l’aide d’un GPS les différents types d’affections au sol sur l’ensemble de la forêt classée. L’observation a été portée sur le volume de recouvrement des couronnes, la stratification, la forme et la densité des troncs des arbres. Les levées étaient effectuées sous la supervision d’un guide forestier qui expliquaient certaines formes d’occupation du sol.

2.2.2-Traitement des données

2.2.2.1- Phase de prétraitement des images

La phase de prétraitement a été axée sur une correction radiométrique et une correction atmosphérique des images satellitaires en vue d’améliorer leurs qualités. La correction radiométrique a consisté à affecter à chaque pixel une valeur radiométrique avoisinante celle collectée sur le terrain. Elle a été effectuée avec le module radiométric calibration du logiciel ENVI. Les corrections atmosphériques ont été effectuées avec le module Dark Substration pour corriger les transformations subies par les rayonnements électromagnétiques.

2.2.2.2-Phase de traitement des images

Cette phase a nécessité la réalisation de compositions colorées afin de mieux discriminer les entités à cartographier. La composition colorée est basée sur un jeu de couleur pour une meilleure identification visuelle des éléments (S. Bengaly, 2012, p.38).

A partir des images issues des compositions colorées, quatre classes d’occupation du sol ont été déterminées. Il s’agit des classes de forêt, d’hévéa, de cultures vivrières et de sols nus.

Après le choix des classes à cartographier, une classification supervisée a été réalisée. Le maximum de vraisemblance est l’algorithme utilisé pour cette classification. En effet, dans la production de la cartographie de l’occupation du sol, le maximum de vraisemblance se présente comme le plus efficace (E. K. Konan et al., 2016 p.156). Cet algorithme réalise la distribution des pixels au sein de chaque classe suivant la loi normale.

Les images obtenues après la classification supervisée ont fait objet de validation. Cette étape a consisté dans un premier temps au calcul de la précision globale et du coefficient de Kappa. Dans un second temps, des validations de terrain ont été réalisées.

La qualité de la classification a été évaluée sous la base de la précision globale et du coefficient Kappa estimé à 0,99. De cette classification, il en est ressorti la matrice de confusion (Tableau 1).

Tableau 1 : Matrice de confusion de la classification de l’image de 2020

ClassesCulture vivrièreSol-nuHévéaForêt
Culture vivrière98.820.000.390.00
Sol – nu0.00100.000.001.23
Hévéa0.000.0099.610.00
Forêt1.180.000.0098.77
Total100.00100.00100.00100.00

Source : Traitement des images satellite Landsat TM – ETM+ – OLI

2.2.2.3-Intégration des données dans un univers SIG

Les données issues de la classification ont été vectorisée puis intégrée dans un univers SIG pour la mise en place d’une base de données. A partir de cette base des calculs et des requêtes ont été effectués afin de générer des statistiques (superficies) et de produire les différentes cartes d’occupation du sol de 1990, 2000 et 2020 de la forêt classée de l’Anguédédou. Toutes ces opérations ont été effectuées à partir du logiciel ArcGIS 10.2.1.

3-  Résultats

3.1- Etats successifs de l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou de 1990 à 2020

3.1.1  – Etat de l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou en 1990

L’occupation du sol de 1990 est mise en évidence par la figure 2. En 1990, Les résultats d’analyse de l’occupation du sol présentent, quatre classes couvrant une superficie de 2808 hectares (Tableau, 2).

Tableau 2: Superficie des différentes classes d’occupation du sol de 1990

Nom des classesSuperficie (ha)Proportion (%)
Culture vivrière73026
Sol nu79028
Hévéa69925
Forêt59021
Superficie totale2808100

Source : Traitement des images satellite Landsat TM – ETM+ – OLI

La classe plus représentée est celle des sols nus avec une superficie de 790 ha soit 28 % de la superficie totale de la forêt classée. Ces sols nus se répartissent sur l’ensemble de la zone mais observent principalement au centre et au Nord-Sud. Les cultures vivrières occupent la deuxième place, avec une superficie de 730 ha soit une proportion de 26%. Elles sont présentes dans la moitié Ouest et dans la moitié Nord de la forêt classée. Les plantations d’hévéa viennent en troisième position. Elles couvrent une superficie de 699 ha et avec proportion de 25 %. Elles sont présentes à ouest, au nord et au centre de la forêt classée. Ces plantations se développent également en bordure de la zone forestière. Les formations forestières occupent la quatrième position avec 590 ha soit 21% de la superficie totale de la forêt classée d’Anguédedou. Elles ont une occupation spatiale suivant une direction nord-ouest de la zone approximativement linéaire.

Carte 2 : Carte d’occupation du sol en 1990

3.1.2  – Etat de l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou en 2000

L’occupation du sol de 2000 est mise en relief par la figure 3. Sur une superficie de 2808 ha que couvre la forêt classée d’Anguédédou (Tableau 3), les formations forestières sont les plus représentées.

Tableau 3 : Superficie des différentes classes d’occupation du sol en 2000

Nom des classesSuperficie (ha)Proportion (%)
Sol nu60922
Forêt163658
Hévéa30511
Culture vivrière2589
Superficie totale2808100

Source : Traitement des images satellite Landsat TM – ETM+ – OLI

En effet, elles occupent 1636 ha soit une proportion de 58%. Elles sont présentes sur toute la zone mais la couverture forestière est moins dense dans l’extrême Nord et l’extrême sud de la zone. Les sols nus quant eux occupent une superficie de 609 ha et représentent 22% de l’espace total. Ils s’observent aux extrêmes nord et sud de forêt classée. Les plantations d’hévéa couvrent 305 ha soit une proportion de 11%. Ces plantations sont présentes sur tout l’ensemble de la zone. Les cultures vivrières s’étendent sur 258 ha avec une proportion de 9%. Les superficies couvertes par les cultures vivrières sont beaucoup plus présentes aux sud- ouest et à l’ouest de la forêt classée.

Figure 3 : Carte d’occupation du sol en 2000

3.1.3  – Etat de l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou en 2020

La carte d’occupation du sol de 2020 est présentée par la figure 4. En 2020, sur une superficie de 2808 ha que couvre la forêt classée d’Anguédédou, les surfaces forestières représentaient la classe la plus importante avec 975 hectares (ha) (Tableau 4) pour une proportion de 35 %.

Tableau 4 : Superficie des différentes classes d’occupation du sol en 2020

Nom des classesSuperficie (ha)Proportion (%)
Sol nu85530
Culture vivrière67624
Forêt97535
Hévéa30211
Superficie totale2808100

Source : Traitement des images satellites Landsat TM – ETM+ – OLI

Les superficies forestières se développent beaucoup plus au centre de la zone d’étude. Les sols nus constituent la deuxième classe la plus importante car ils occupent 855 ha soit 30% de la superficie totale de la forêt classée. Ils sont situés aux abords des forêts et constituent une forme de ceinture s’étalant du nord vers l’ouest de la zone. Cependant, des surfaces de sol nu s’observent à l’ouest et centre dans la forêt classée. La troisième classe importante est celle des cultures vivrières. Elle occupe 676 ha soit 24 % de taux d’occupation de l’espace total de la forêt classée.

Figure 4 : Carte d’occupation du sol en 2020

3.2  – Evolution de l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou de 1990 à 2020

  • – Dynamique de l’occupation du sol de 1990 à 2000

L’analyse de l’occupation du sol de 1990 à 2000 montre qu’en dehors des superficies forestières qui ont enregistré des accroissements, les trois autres classes ont connu des régressions. Au cours de cette période, les superficies forestières de 590 ha en 1990 à 1636 ha en 2000 soit une augmentation de 1046 ha représentant un taux d’accroissement de 37% avec un taux d’évolution globale de 177 % (Tableau 5). Les superficies de cultures vivrières sont passées de 730 ha en 1990 à 258 ha en 2000 d’où une régression de 472 ha soit une proportion de -17% et un taux d’évolution globale de -65 %. Les superficies d’hévéa quant à elles de 699 ha en 1990 sont passées à 305 ha en 2000. Cela représente une régression de 394 ha soit une proportion de

-14% et un taux d’évolution globale de -56%. Les surfaces des sols nus avec des superficies de 790 ha en 1990 et 609 ha en 2000, ont régressé de -181 ha représentant un taux de régression de -6 % et un taux d’évolution globale de -23%.

Tableau 5 : Evolution des types d’occupation du sol dans la forêt classée de 1990 à 2000

  ClassesSuperficie (ha)Accroissement/ RégressionTEG
 199020001990-20001990-2000
 (ha)(%)(ha)(%)(ha)(%)%
Culture vivrière730262589-472-17-65
Sol nu7902860922-181-6-23
Hévéa6992530511-394-14-56
Forêt59021163658104637177
Superficie Totale28081002808100  

Source : Traitement des images satellites Landsat TM – ETM+ – OLI

3.2.2  – Dynamique de l’occupation du sol de 2000 à 2020

L’analyse de la dynamique de l’occupation du sol de 2000 à 2020 montre un accroissement des superficies des cultures vivrières et des sols nus, et une régression de celles des formations forestières et des plantations d’hévéa (Tableau 6).

Tableau 6 : Evolution des types d’occupation du sol dans la forêt classée de 1990 à 2000

  ClassesSuperficie (ha)Accroissement/ RégressionTEG
 200020202000-20202000-2020
 (ha)(%)(ha)(%)(ha)(%)%
Culture vivriere25896762441826162
Sol nu6092285530246840
Hévéa3051130211– 30-1
Forêt16365897535-661-23-40
Superficie totale2808 1002808100  

Source : Traitement des images satellites Landsat TM – ETM+ – OLI

En effet de 258 ha en 2000 les superficies des cultures vivrières sont passées à 676 ha avec un gain de 418 ha. Ce qui représente une proportion de 26% et d’un TEG de 162%. Au cours de la période 2000-2020, les superficies de cultures vivrières ont augmenté et cela traduit une intensification des activités agricoles dans la forêt classée avec la priorité donnée aux cultures vivrières. Les cultures les plus représentées sont le maïs (Photo 1) le manioc (Photo 2).

Photo 1 : Vue d’un champ de maïs réalisé                     Photo 2 : Vue d’un champ de manioc à l’intérieur de la à l’intérieur de la forêt classée                                   Forêt classée .

Cliché : Durand OBOUE, Mars 2021.                                    Cliché : OBOUE Durand, Mars 2021

Au cours de la période 2000-2020, les sols nus ont augmenté de 246 ha en superficie soit un taux d’accroissement de 8% et d’un TEG de 40%. Une importante surface de sol nu servant à la production de charbon de bois a été observée dans la forêt classée (Photo 3).

Photo 3 : Vue de l’espace de production du charbon de bois

Cliché : OBOUE Durand, Mars 2021.

Les sols nus à l’intérieur de la forêt classée d’Anguédédou sont également représentés par des dépotoirs d’ordures pour des particuliers. Ces sols relèvent de l’incinération des déchets et principalement des pneus usés de sorte à recueillir la matière en acier et le caoutchouc (Photo 4).

Photo 4 : Vue d’un espace d’incinération des déchets.

Photo 5 : Vue d’un espace d’incinération des déchets.

Cliché : OBOUE Durand, Mars 2021.

Les superficies des plantations d’hévéa ont enregistré une faible régression de 23 ha ( -3% ) car de 305 ha en 2000, elles sont passées à 302 ha en 2020. Ces plantations sont éssentiellement de de jeunes plantations d’hévéa (Photo 5).

Photo 6 : Vue d’une jeune plantation d’hévéa

Cliché : OBOUE Durand, Mars 2021.

3.2.3- Evolution globale des surfaces d’occupation du sol de la forêt classée de 1990 à 2020

L’analyse de l’évolution globale des différents types d’occupation du sol dans la forêt classée d’Anguédédou revèle qu’au cours de la période 1990 à 2020, les quatre classes ont évolué en termes de superficie soit par accroissement ou par régression (Tableau 7). Ainsi, les surfaces de cultures vivrières ont augmenté de 125 ha avec un Taux d’accroissement de 4% et un TEG de 17%. Les superficies des plantations d’hévéa ont régressé de 397 ha représentant un taux de régression de -14 % avec un TEG de -57%.

Les sols nus ont quant à eux ont enregistré une régression de 114 ha représentant une proportion de -4% avec un TEG de -14%. Les formations forestières représentent le type d’occupation du

sol ayant connu une forte augmentation. En effet, en 30 ans, les superficies forestières forêt a gagné 385 ha soit un taux d’accroissement de 14% avec TEG étant positif, il est de 65%. Cette situation pourrait s’expliquer par les politiques de reboisement et de gestion mises en place par les autorités en charge de la gestion des forêts classées en Côte d’Ivoire.

Tableau 7 : Evolution globale des types d’occupation du sol dans la forêt classée d’Anguédédou de 1990 à 2020

Source : Traitement des images satellites Landsat TM – ETM+ – OLI

TEG = Taux d’Evolution Globale

4-   Discussion

La présente étude dont l’objectif était d’analyser l’occupation du sol de la forêt classée d’Anguédédou de 1990 à 2020 a à partir d’une méthodologie basée sur la cartographie de l’occupation du sol avec des images Landsat. abouti à plusieurs résultats. D’une part, elle a permis de connaitre l’état de l’occupation du sol de la forêt classée en 1990, en 2000 et en 2020 et d’autre part, l’évolution des superficies des types d’occupation du sol au cours de la période. Les résultats de cette étude montrent légère régression des surfaces forestières et une augmentation des surfaces anthropisées (Cultures vivrères, plantations d’hévéa et sols nus).

Ces résultats corroborent avec ceux de E. K. Konan et al (2016, p.166), qui dans une étude sur le Parc National de la Comoé ont utilisé des images Landsat et ont montré une régression des surfaces forestières voire naturelles au profit des surfaces anthropisées.

En 1990, la couverture forestière était moins importante qu’en 2000 et en 2020. En effet, au cours des 20 dernières années, la forêt classée d’Anguédédou a connu des aménagements et un déclassement. De 1975 à 1980, sous l’effet d’emprises routières, la forêt classée a perdu 42 hectares, faisant passer la superficie de 5 670 à 5 580 hectares (SODEFOR, 2006, p.7).

Aussi, en 1982, un déclassement de 90 hectares a été effectué

A partir de l’année 2000, la superficie de la couverture forestière de forêt classée d’Anguédédou a connu une régression. En effet, en 2003, 185 hectares ont été mis à disposition du parc national du Banco faisant passer la superficie de la forêt d’Anguédédou désormais de 5670 à 5 485 hectares. Le 11 Juin 2004, un nouveau déclassement de 424 hectares est effectué, faisant passer la couverture forestière de 5 485 à 5 061 hectares (SODEFOR, 2006, p.7).

Conclusion

L’étude de l’occupation du sol dans la forêt classée d’Anguédédou, permet de mettre en évidence les états successifs du couvert végétal et d’analyser son évolution entre 1990 et 2020. Au cours de la période 1990-2020, les superficies des différents types d’occupation observés dans la forêt classée n’ont pas été stables. Elles ont connu des fortunes diverses à savoir des régressions et des accroissements. Ainsi, les superficies des couvertures forestières ont augmenté de 14% tandis que celles des plantations d’hévéa ont régressé de 14%. Les superficies

des sols nus ont enregistré une régression de 4%. A l’opposé, les superficies des cultures vivrières ont enregistré une évolution de 4%. Cette étude au-delà de son aspect pratique, est un moyen d’investigation si on souhaite analyser les dynamiques d’occupation du sol et les interactions sociétés/milieux. La base cartographique mise en place constitue un outil de gestion des unités de conservation des écosystèmes voire un outil efficace à mettre à la disposition des gestionnaires des espaces protégés.

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