Durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles de la plaine inondable des communes de Dangbo et d’Adjohoun au Sud-Est du Benin

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MOURITALA Abou, IBOURAÏMA Yabi, Evariste O. B. ADEOTI, Euloge OGOUWALE

Résumé

Dans les pays comme le Bénin, l’opinion de la société sur les fonctions de son agriculture se fonde sur un certain nombre de valeurs comme le développement humain, la citoyenneté, la qualité de vie, le développement local ou l’emploi. Mais, l’atteinte de ces valeurs n’est possible que si les pratiques agricoles actuelles augurent une durabilité des aménagements hydro-agricoles. La présente recherche évalue la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles de la plaine inondable des Communes de Dangbo et d’Adjohoun. Les travaux de recherche sur le terrain ont été réalisés dans huit (8) arrondissements (Késsounou, Houédomey, Gbéko, Zounguè, Gangban, Kodé, Démè et Azowlissè) auprès de 254 ménages des sites d’aménagements hydro-agricoles. Les informations socio-agricoles ont été recueillies sur la base d’un questionnaire. Au total,20 périmètres aménagés
choisis parmi les 66, ont été retenus pour évaluer leur durabilité socio-territoriale. Le traitement des données a été fait selon les différentes modalités de détermination des niveaux de durabilité des exploitations agricoles proposées par la méthode d’Indicateur de Durabilité des Exploitations Agricoles (IDEA) de Vilain (2008).
Les résultats obtenus ont montré un score moyen de 43,99 sur 100. D’un point de vue général, la composante « Qualité des produits et du terroir » présente un score faible de 11,2/33, constituant ainsi un facteur limitant de la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles. Tandis que, les composantes « Emploi et services au territoire » 16,91/33 et « Ethique et développement » 15,88/34 ont obtenu des points forts. Il convient donc d’envisager des réflexions sur les pratiques limitant la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles dans les Communes de Dangbo et d’Adjohoun.

Mots-clés : Basse vallée de l’Ouémé (Sud-Bénin), aménagements hydro-agricoles, durabilité socio-territoriale, méthode IDEA

Abstract :

Key words:

INTRODUCTION

Le Développement durable, défini depuis 1992 au sommet de Rio comme étant « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ». Ce concept est de plus en plus mis en avant d’après M’Hamdi et al. (2009) pour répondre aux problèmes socio-environnementaux. Dans le monde, il importe que l’activité agricole assure une fonction économique de production de biens, de services et de la création d’emplois ruraux (Ligan, 2015, p. 19).
L’agriculture est une activité des territoires ruraux (Pierre et al., 2008). En Afrique de l’Ouest, elle a un poids économique particulier puisque dans la zone de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), elle contribue pour 30 % au Produit Intérieur Brut (PIB) et emploie plus de 50 % de la population active (Renard et al., 2004). Au Bénin, les terres irrigables sont estimées à 322.000 ha dont 117 000 ha de plaines inondables et 205 000 ha de bas-fonds (MAEP, 2005). Le pays dispose alors d’un potentiel important en ressources naturelles pour la production hydro-agricole. Pour Dufumier (1996), l’aménagement hydroagricole est toute technique de maîtrise partielle ou totale de l’eau à des fins agricoles. Mais, force est de constater de nos jours que, les agriculteurs adoptent des pratiques incompatibles à la durabilité de l’agriculture qui engendrent des conséquences négatives sur l’environnement (Ligan, 2015). Ces conséquences sont la dégradation des sols, les pollutions des eaux, et l’appauvrissement de la biodiversité (Steinfeld et al., 2006). Ces constats s’observent dans les Communes de Dangbo et d’Adjohoun, situées dans la basse vallée de l’Ouémé. Alors qu’elles disposent d’une plaine inondable assez riche qui a facilité le développement des aménagements hydro-agricoles (Abou et al., 2018a). Ces aménagements hydro-agricoles sont caractérisés par plusieurs systèmes de production (irrigués, de décrue et pêche) qui sont censés améliorer les rendements des exploitants agricoles (Abou et al., 2018b). Cette étude
vise à évaluer la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles dans les Communes de Dangbo et d’Adjohoun.

1. Présentation de la zone d’étude

Les Communes de Dangbo et d’Adjohoun sont situées dans le département de l’Ouémé entre 6°30’ et 6°47’ de latitude nord et entre 2°24’ et 2°35’de longitude est. Elles sont limitées au nord par la Commune de Bonou, au sud par la Commune des Aguégués, à l’est par la Commune de Sakété et à l’ouest par la Commune de Zè (figure 1). Les Communes de Dangbo et d’Adjohoun couvrent une superficie de 428 km² (INSAE/RGPH, 2013).

L’assiette pédologique de la plaine inondable est constituée des sols alluviaux et colluviaux dans le lit du cours d’eau ainsi que des vertisols dans les marécages. A la faveur des crues périodiques de l’Ouémé et ses affluents, ces sols sont enrichis en limon, ce qui renouvelle leur fertilité. Cette plaine s’étend de part et d’autre du fleuve Ouémé qui l’inonde annuellement entre les mois de juillet et novembre. Les conditions hydriques des sols de la plaine de Dangbo et d’Adjohoun sont très favorables aux activités agricoles (Boko, 1988). Les aménagements hydro-agricoles se mènent sur une plaine inondable ne dépassant pas 10 m d’altitude d’axe nord-sud qui, dans la toposéquence est-ouest, jouxte le plateau. Par ailleurs, le plateau de la zone d’étude est d’une altitude comprise entre 20 et 200 m et présente des ondulations. Le milieu d’étude dispose d’un réseau hydrographique dense dont le plus important cours d’eau est le fleuve Ouémé auquel viennent s’ajouter le confluent Sô, les rivières Tovè, Sissè, les lacs Hlan, Hounhoun favorisant ainsi les aménagements hydro-agricoles et l’exploitation halieutique. Pour Chikou (2006, p. 32), ces confluents de diverses sources se jettent dans le fleuve Ouémé. Sur la plaine inondable des Communes de Dangbo et d’Adjohoun, on distingue les aménagements hydro-agricoles par drainage et les aménagements hydro-agricoles par pompage. En effet, les aménagements hydro-agricoles par drainage sont constitués généralement des drains permettant d’évacuer l’eau d’un champ. Les drains creusés selon le sens de la pente, sont souvent parallèles aux cultures, ce qui facilite rapidement l’écoulement de l’eau en cas d’inondation. Par contre, l’aménagement hydro-agricole par pompage consiste à l’utilisation de motopompe, des tuyaux et les eaux du canal de dérivation. Cet aménagement, pratiqué par 93 % des enquêtés, est basé sur le système de casierage, une séparation de l’exploitation par des diguettes et un planage des casiers. La régulation de l’eau est assurée grâce à des tuyaux en plastique qui permettent le remplissage et la vidange des casiers.

2. Méthodes de collecte et de traitement des données

2.1-Méthodes de collecte des données

Les données collectées sont des informations qualitatives et quantitatives collectées auprès des exploitants agricoles. Elles concernent les composantes suivantes : qualité des produits et du terroir, l’emploi et les services, l’éthique et le développement humain. Les enquêtes de terrain ont été réalisées dans huit (08) arrondissements (Késsounou, Houédomey, Gbéko, Zounguè, Gangban, Kodé, Démè et Azowlissè) sur les quinze (15) que comprend la zone d’étude. L’échantillonnage raisonné des arrondissements a été effectué en suivant les critères de proximité du fleuve Ouémé qui facilite les activités hydro-agricoles sur la plaine d’inondation. La taille de l’échantillon a été déterminée grâce au protocole de Schwartz (1995) par la formule : n= Zα2 x p q/i2. Avec : Z α = 1,96 : écart réduit correspondant à un risque α de 5% ; p = n/N, p étant la proportion des ménages qui développent les aménagements hydro-agricoles par rapport aux ménages totaux dans les Communes d’étude i = précision désirée égale à 6% ; q = 1- p, n= (1,96)2 x p (1-p) /0,052. Le choix des périmètres aménagés qui ont servi à l’évaluation est fait de façon raisonnée dans les exploitations agricoles (Tableau 1).

Au total, 20 périmètres aménagés sur les 66 ont été retenus. Pour évaluer la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles, 254 exploitants agricoles ont été interviewés. La grille d’observation a permis d’observer la qualité des produits offerts aux populations, les services rendus dans la société et l’organisation des acteurs sur les périmètres aménagés.

2.2-Méthodes de traitement des informations

  •  Processus d’utilisation de la méthode IDEA

La méthode d’Indicateur de Durabilité des Exploitations Agricoles (IDEA) permet d’évaluer la durabilité des systèmes d’exploitation agricole. Pour cette étude, l’évaluation s’est basée sur la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles. Cette échelle de la méthode est subdivisée en 3 composantes : qualité des produits et du terroir, emploi et services, éthique et développement humain. Elle comporte 16 indicateurs de durabilité. La méthode retient des notes maximales 14 ou minimales 0 pour chaque indicateur, de façon à plafonner le nombre total d’unités de durabilité se rapportant au domaine étudié. La notation de l’échelle varie sur une gamme de 0 à 100 points (Vilain et al., 2000). Le score de l’exploitation pour l’échelle de durabilité socio-territoriale est le nombre cumulé d’unités élémentaires de durabilité obtenues dans les divers indicateurs tenus en compte dans cette échelle. Par exemple, la détermination du score de l’indicateur « Accueil, Hygiène et Sécurité » est obtenue en suivant la procédure comme l’indique le Tableau 2.

Le Tableau 2 présente les données et modalités de détermination du niveau de durabilité ainsi que le score et la valeur plafond de l’indicateur. Ainsi, plus la note est élevée, plus l’exploitation est considérée comme durable pour l’échelle examinée. Les notes maximales traduisent le poids accordé à chaque indicateur au sein du domaine auquel il se rapporte. Ainsi, les indicateurs fondamentaux ayant plus de poids que les indicateurs spécifiques sont classés entre eux. Toutefois, il n’est pas rare d’attribuer des notes négatives à certains indicateurs causant des préjudices sur la durabilité. Au sein d’une échelle donnée, les poids des divers domaines sont soit identiques, ou soit légèrement différents.

  • Analyse des informations

Les informations socio-agricoles collectées sur le terrain ont été manuellement dépouillées et traitées en suivant les modalités de détermination du niveau de durabilité proposées par la méthode IDEA. Les scores moyens de chaque indicateur au sein des 3 composantes ont été analysés par rapport aux valeurs maximales. De ce fait, il a été dégagé les indicateurs de faibles scores et ceux des scores élevés. La contribution de la durabilité socio-territoriale a été analysée à partir des scores moyens des composantes.

3. Résultats

Le tableau 3 et la figure 2 présentent les scores moyens des composantes de l’échelle de la durabilité socio-territoriale. Il ressort de leur analyse que l’échelle de durabilité socioterritoriale présente un total de scores moyens de 43,99 sur 100 points. Par rapport à ces résultats, seules les composantes « Emploi et services au territoire » 16,91 sur 33 et « Ethique et développement humain » 15,88 sur 34 ont participé largement à la durabilité socio-territoriale tandis que la « Qualité des produits et du terroir » 11,2 sur 33 constituent un facteur limitant la durabilité socio-territoriale des aménagements hydro-agricoles du milieu de recherche.

3.1-Composante « Qualité des produits et du terroir »

Les résultats de cette composante ne sont pas satisfaisants. Son score est de 11,2 sur 33 points. L’indicateur « Valorisation du patrimoine bâti et du paysage » avec un score de 1,68 sur 12 et celui « Gestion des déchets non organiques » dont le score est de 1,2 sur 6 ont enregistré des résultats faibles. Ces valeurs sont dues à l’inexistence des cases ou habitations pouvant servir de lieu de repos ou d’entrepôt des équipements de travail sur les sites. Cette situation s’explique par la proximité de près de 60 % des exploitations du centre-ville. Selon les résultats obtenus, plus de 11 exploitations, soit 55 %, sont distantes d’environ 2 km du lieu
d’habitation des exploitants. S’agissant des contenants des pesticides (herbicides et insecticides), une proportion de 15 % des exploitants les brûle, tandis que 25 % les enfouissent dans le sol sur le site, 20 % les jettent sur l’exploitation et 40 % les réutilisent
pour l’achat d’huile de cuisine, la conservation des grains de gombo souvent rare en période de décrue et la prise de l’eau de boisson sur le site. Ces différents usages sont contraires à la méthode IDEA. En revanche, les scores moyens des indicateurs « Accessibilité de l’espace » (2,24 sur 4) et « Implication sociale » (6,08 sur 8) constituent des points forts de la composante. En effet, ces périmètres aménagés sont ouverts à tout le monde et ne disposent pas des clôtures pouvant empêcher la circulation des motocyclistes. Selon 90 % des enquêtés, l’entretien régulier des chemins facilite la praticabilité et l’accessibilité aux exploitations.
Toutefois, le phénomène contraire peut s’observer en cas d’inondation ou pendant la crue.

3.2-Composante « Emploi et services au territoire »

La méthode IDEA cherche à valoriser la production par des circuits alimentaires courts en impliquant 0 ou 1 intermédiaire entre le producteur agricole et le consommateur. Il ressort de l’analyse du tableau 3 et de la figure 2 que le facteur limitant de la durabilité au niveau de la composante « Emploi et services au territoire » est l’indicateur « Valorisation par filière courte » avec une faible note de 1,05 sur une valeur plafonnée à 5. Pour les résultats obtenus, 75 % des produits sont vendus hors des Communes de Dangbo et d’Adjohoun par le biais des intermédiaires commerçants locaux de la localité. Cette vente directe des produits brise le lien
entre l’exploitant et le consommateur dont les retombées peuvent s’observer par l’indisponibilité et l’inaccessibilité des produits sur les marchés locaux. Par contre, tous les autres indicateurs de cette composante présentent des résultats satisfaisants. L’indicateur « Travail collectif » a obtenu un score moyen élevé de 6,03 plafonné sur 9 points. Ce qui témoigne des pratiques d’entraide et des activités champêtres réalisées collectivement par les groupements ou associations des exploitants agricoles (Photo 1).

La photo 1 montre le système de repiquage du riz par les membres de la Coopérative Villageoise des Producteurs (CVP) de Dannou. Ces membres sont composés des hommes et des femmes qui pratiquent la riziculture et le maraîchage. Des services marchands ou non marchands s’observent grâce à la réalisation des infrastructures socio-communautaires de base (écoles, maternité et église) et la location de l’équipement agricole (motopompe, arrosoir, filet de pêche) aux exploitants qui n’en possèdent pas.

3.3-Composante « Ethique et développement humain »

Certaines valeurs d’indicateurs comme l’intensité de travail, la qualité de vie et le sentiment d’isolement sont auto-déclaratives et estimées par l’exploitant. Du point de vu de l’intensité du travail 1,61 sur 7, des surcharges sont fréquemment ressenties par les exploitants et salariés (plus de 6 semaines de surcharge par an par personne. L’indicateur « Accueil, hygiène et sécurité » 2,7 sur 6 met en avant une lacune dans les domaines hygiène et sécurité qui mettent en danger les exploitants suite au mauvais stockage des pesticides, ce qui n’est pas conforme aux préconisations réglementaires. Par contre, l’indicateur « Formation » a obtenu un score élevé 5,39 sur 7. Dans cet indicateur, il s’agit des formations reçues par les chefs d’exploitation et les stagiaires ou étudiants accueillis sur l’exploitation. Pour nos résultats, les Agents des Secteurs Communaux pour le Développement Agricole (SCDA) participent activement à la formation des exploitants agricoles. De plus, le Projet d’Appui à la Diversification Agricole (PADA) et le Programme d’Appui aux Investissements Agricoles dans la Vallée de l’Ouémé (PAIA-VO) accordent régulièrement des aides financières et techniques à 45 % des exploitations aménagées de la zone d’étude. Pour la Commune de Dangbo et d’Adjohoun, 52 % des exploitants reçoivent des formations sur plus de 15 jours/personne/an ; 40 % accueillent des stagiaires qui séjournent dans le territoire pendant 30 voire 60 jours dans le but de transférer les connaissances aux exploitants et vice-versa.

4. Discussion et suggestions

4.1-Composante « Qualité des produits et du terroir »

Les scores de la composante « Qualité des produits et du terroir » ne sont pas reluisants. C’est dû aux faibles scores des indicateurs « Valorisation du patrimoine bâti et du paysage » et « Gestion des déchets non organiques ». Par contre, des scores élevés sont obtenus dans les indicateurs « Accessibilité de l’espace » et « Implication sociale ». Le résultat de cette composante a été confirmé par les études de Bekhouche-Guendouz (2011) réalisées dans les exploitations bovines laitières des bassins de la Mitidja et d’Annaba en Algérie. L’indicateur « Implication sociale » présente une bonne performance qui reflète l’attachement des chefs d’exploitation à des postes de responsabilité dans une structure associative. Ce résultat est légèrement au-dessus de celui de Ligan (2015) qui témoigne de l’implication sociale des exploitations agricoles de la Commune de Gogounou au Bénin. Par contre, l’indicateur « Valorisation du patrimoine bâti et du paysage » avec une valeur de 1,68 est un facteur limitant de la composante. Ce résultat concorde avec celui d’Elabidi (2017) concernant la durabilité de l’élevage ovin laitier en Tunisie ainsi que celui rapporté par le Programme d’Appui au Programme National d’Investissement de l’Agriculture au Sénégal (2016) dans l’évaluation des exploitations maraîchères dans le bassin arachidier du Sénégal.

4.2-Composante « Emploi et services au territoire »

D’un point de vu général, le résultat de cette composante est peu satisfaisant grâce aux indicateurs qui ont obtenu de bons scores sauf l’indicateur « Valorisation par filière courte » qui affiche un score faible. Cette faible valeur peut s’expliquer par le fait qu’une grande quantité de produits est consommée hors de la localité de l’exploitation. Nos résultats présentent des valeurs élevées au regard de ceux de M’Hamdi et al. (2009, p. 4) réalisés sur l’évaluation de la durabilité des exploitations laitières tunisiennes. Par contre, les mêmes résultats de la composante « Emploi et services au territoire » sont contraires à ceux du Programme National Agriculture Durable et Développement Durable (2005, p. 6) dont les études ont été réalisées sur l’évolution de la durabilité de l’exploitation de la bergerie nationale de Rambouillet.

4.3-Composante « Ethique et développement humain »

Les faibles valeurs obtenues dans cette composante sont dues aux différents scores obtenus par les indicateurs. Malgré la faible moyenne enregistrée, ces résultats sont très élevés par rapport à ceux de Ligan (2015) qui présentent un score de 10,9 dans les exploitations agricoles de Gogounou. Ce résultat est dû au score 0 obtenu dans les indicateurs « Contribution à l’équilibre alimentaire mondial » et « Bien-être animal ». Gérer rationnellement le temps de travail au niveau d’un système agricole, permet une bonne réalisation des tâches quotidiennes et permet d’une part d’avoir plus de temps pour des imprévus, et de fournir de l’aide aux autres exploitants en cas de besoin d’autre part, ce qui contribue à l’épanouissement de l’exploitants et de ses ouvriers (Bekhouche-Guendouz, 2011, p. 166). Malheureusement, les exploitants des périmètres aménagés de la Commune de Dangbo et d’Adjohoun se sentent surchargés par les activités hydro-agricoles. Ce qui témoigne d’un faible score de 1,61 de l’indicateur « Intensité de travail ». Ces résultats de la composante « Ethique et développement humain » sont proches de ceux d’Elabidi (2017) qui présentent un score moyen de 13,65 dans les exploitations laitières tunisiennes. Par ailleurs, les pistes de réflexion pour une amélioration impliquent la remise en cause de certaines pratiques agricoles.

4.4-Suggestions pour des aménagements hydro-agricoles durables

Les pistes de réflexion et recommandations sont axées sur les indicateurs qui ne contribuent pas à améliorer la durabilité sociale et environnementale des aménagements hydro-agricoles. En effet, certaines pratiques déplorables dans la composante « Qualité des produits et du terroir » constituent ainsi un facteur limitant. Les réflexions sont orientées vers une bonne valorisation du patrimoine bâti et du paysage. Ainsi, sur l’exploitation, les exploitants agricoles doivent penser à la restauration du bâti ancien et du patrimoine rural, à la qualité architecturale et intégrateur du bâti récent, à la création d’une case ou habitation sur l’exploitation (pour les exploitations loin de la ville) et à l’aménagement paysager aux alentours des surfaces de l’exploitation. Il est préférable d’interdire les mauvaises pratiques que condamne la méthode IDEA pour une évolution durable des périmètres aménagés. En effet, la méthode IDEA recommande aux exploitants agricoles, la préservation des ressources naturelles (eau, air, sol, biodiversité, paysages) l’existence des valeurs sociales (éthique, qualité et citoyenneté). Toutefois, l’indicateur « Intensité de travail » mérite une réflexion approfondie afin de garantir le bien-être des exploitants agricoles. Les travaux champêtres étant manuels, l’exploitant doit pouvoir les planifier pour une bonne gestion du temps durant la saison agricole. Les exploitants agricoles doivent cesser de vendre les produits par des circuits d’intermédiaire venant d’horizons diverses.

Conclusion

Une agriculture durable doit être économiquement viable, écologiquement saine et socialement équitable. Les périmètres aménagés durables doivent donc répondre au mieux à ces trois objectifs, dans le contexte de leur territoire et de leur système agraire. C’est dans cette optique que la méthode IDEA a été élaborée pour effectuer un diagnostic de durabilité des périmètres à partir d’enquêtes directes auprès des exploitants. L’échelle de durabilité socio-territoriale prise en compte dans cette étude regroupe trois composantes à l’intérieur desquelles se trouvent des indicateurs. L’évaluation de la durabilité des périmètres aménagés a permis de caractériser les pratiques agricoles actuelles. Seules les composantes « Emploi et service au territoire » et « Ethique et développement humain » participent à la durabilité socio-territoriale. Par contre, la composante « Qualité des produits et terroir » constitue un facteur limitant. Elles sont liées à l’absence d’une bonne pratique de la valorisation du patrimoine bâti et du paysage, de la gestion des déchets non organiques, de la valorisation par filières courtes et de l’intensité de travail. Face à ces constats, des marges de progrès ont été envisagées pour non seulement remédier aux pratiques agricoles défavorables mais maintenir celles qui sont favorables afin de garantir un aménagement hydro-agricole durable.

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Auteur(s)


1MOURITALA Abou– e-mail :elmouth.abou@yahoo.fr

2 IBOURAÏMA Yabi

3 Evariste O. B. ADEOTI

4 Euloge OGOUWALE

Laboratoire Pierre Pagney, Climat, Eau, Ecosystèmes et Développement (LACEEDE),

Département de Géographie et Aménagement du Territoire (DGAT),

Université d’Abomey-Calavi (UAC, Cotonou, République du Bénin)

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