Les risques naturels et leurs manifestations dans les villes secondaires ivoiriennes : cas de Tiassalé et N’Douci (Côte d’Ivoire)
Résumé :
En Côte d’ivoire, l’extension des agglomérations du fait de l’augmentation de la densité de la population n’épargne pas les zones impropres à l’habitat. Les villes de Tiassalé et de n’douci n’échappent pas à cette réalité. L’objectif de la présente étude est d’analyser les manifestations des risques d’inondation et d’érosion ainsi que leurs effets, aussi bien sur le cadre de vie que sur les populations des villes de Tiassalé et N’douci. Ce travail a nécessité une méthodologie qui combine la recherche documentaire, des enquêtes et des entretiens. Les sites à risque sont déterminés en suivant une démarche basée sur les SIG dont le résultat final est l’établissement de cartes d’inondation et d’érosion. Les enquêtes ont permis des prises de vue pour mettre en évidence l’action de l’inondation et de l’érosion sur la population et son cadre de vie. Des résultats de cette étude, il ressort que la signature de l’érosion se résume aux marques que sont : le déchaussement des fondations de maisons, un ravinement inquiétant des rues en terre battue et leur ensablement dans les sections où l’intensité de la pente justifie ce processus. Les habitations construites près des bas-fonds et dans les lits majeurs des cours d’eau sont inondées avec des niveaux d’eau considérable.
Mots-clés : Côte-d’Ivoire, Tiassalé, N’douci, Risques naturels.
Natural risks and their manifestations in secondary Ivory towns: case of Tiassalé and N’Douci (Côte d’Ivoire)
Abstract
In Ivory Coast, the expansion of urban areas due to the increase in population density does not spare areas unsuitable for habitation. The towns of Tiassalé and N’douci are no exception to this reality. The objective of this study is to analyze the manifestations of flooding and erosion risks as well as their effects, both on the living environment and on the populations of the towns of Tiassalé and N’douci. This work required a methodology that combines documentary research, surveys and interviews. Sites at risk are determined by following an approach based on GIS, the final result of which is the establishment of flood and erosion maps. The surveys allowed photographs to be taken to highlight the action of flooding and erosion on the population and their living environment.
From the results of this study, it appears that the signature of erosion comes down to the marks that are: the loosening of house foundations, a worrying washout of the dirt streets and their silting up in sections where the intensity of the slope justifies this process. Houses built near lowlands and in major river beds are flooded with considerable water levels.
Key word : Ivory Coast, Tiassalé, N’douci, Natural risks
Introduction
Au cours de ces dernières décennies, plusieurs pays du monde ont été gravement affectés par des évènements météorologiques extrêmes tels que : les sécheresses, les précipitations extrêmes (Wallez, 2010, cité par Charles et al, 2022, p. 2). La multiplication de ces événements extrêmes peut être considérée comme des indicateurs du changement climatique.
Ces phénomènes n’épargnent pas les villes des pays en voie de développement au travers de risques naturels. La situation est particulièrement préoccupante en Afrique subsaharienne où les risques affectent la plupart des villes, à cause de l’insuffisance d’aménagement des sites urbains liés à l’érosion et à l’inondation (A. Della et al., 2018, p. 2). Ces risques constituent une préoccupation majeure en matière d’aménagement et de gestion du territoire (Kirill, 2007, cité par Charles et al., 2022, p. 2)
En Côte d’Ivoire, seules les villes d’Abidjan et certaines du littoral ont fait l’objet d’étude en ce qui concerne les risques naturels. Les villes de l’intérieur comme Tiassalé et N’douci sont moins documentées sur les questions relatives aux risques naturels au point que nous ignorons l’ampleur. Pourtant, les centres urbains de Tiassalé et de N’douci sont régulièrement confrontés à des aléas d’inondation et d’érosion. Cela s’observe lors des différentes saisons de pluies ; les voies de communication sont régulièrement coupées, rendant la circulation difficile ; les traces de l’eau sur les murs témoignent l’impact de l’inondation. L’urbanisation accélérée de ces villes accentue ce phénomène. Cela s’observe en 2014 à Tiassalé où la population résidente en ville est de 77,18 % pour une population de 20 057 habitants sur 25 987 habitants contre 47,57 % à N’douci pour 27 112 habitants sur 56 990 habitants. Même si les inondations se présentent comme des aléas principaux responsables des désagréments que connaissent les populations de Tiassalé et N’douci, le phénomène d’érosion n’est pas à négliger. Il se signale sur les rares pentes que présentent ces deux villes avec en projection une multiplication et une intensification dont les conséquences pourraient se révéler catastrophiques pour les sociétés humaines selon le
Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC, 2007, cité par Charles et a.l, 2022, p. 2). L’objectif de cette étude est d’analyser les manifestations des risques d’inondation et d’érosion ainsi que leurs effets, aussi bien sur le cadre de vie que sur les populations des villes de Tiassalé et N’douci.
1. Matériels et méthodes
Cette étude a mobilisé un certain nombre de données et méthodes pour aboutir aux différents résultats.
1.1. Matériels
1.1.1. Présentation de la zone d’étude
Les localités de Tiassalé et N’douci situées à la lisière du « V » baoulé, appartiennent à la région de l’Agnéby-Tiassa. Elles sont comprises entre 5°52ʼ00ʼʼ et 5°54ʼ00ʼʼ latitude Nord et 4°45ʼ00ʼʼ de longitude Ouest (Fig. 1). Ces villes sont situées au Nord de la capitale économique à une distance de 120 km, sont en concurrence avec les deux capitales du pays à savoir :
Yamoussoukro et Abidjan. Les villes de Tiassalé et N’douci sont classées dans la catégorie des villes secondaires. Elles ont respectivement des populations qui ont évolué dans le temps. Ces villes s’étendent respectivement sur 500 ha pour Tiassalé avec une population estimée à 29 535 habitants (RGPH, 2014, p. 12) et N’douci avec 700 ha pour une population de 31 386 habitants (RGPH, 2014, p. 12). Ces deux centres urbains sont organisés en plusieurs quartiers avec divers types d’habitats. On y rencontre des quartiers d’habitat résidentiel, des quartiers d’habitat évolutif. On y trouve également des villages qui sont les noyaux urbains phagocyté par le fait urbain. Cela donne naissance à un habitat dominé par le type traditionnel qui cohabite avec l’habitat de type urbain.
Figure 1 : Localisation des villes de Tiassalé et N’douci
Source : CNTIG. Fond de carte, 2011. Réalisation : Kouakou.S.E, 2018
1.2. Méthodes
L’étude s’est appuyée sur la recherche documentaire et l’enquête (questionnaire et entretiens), la cartographie et l’analyse statistique. Les sources documentaires ont fourni d’importantes données secondaires utiles à la réalisation de cette étude. De plus, pour collecter les données sur terrain, 734 ménages sinistrés ont été soumis à un questionnaire. Par ailleurs, des données ont été collectées lors d’entretiens avec les autorités publiques en charges de la gestion des risques et catastrophes, des responsables au niveau des quartiers. Une base de données a été constituée dans le cadre de l’analyse des différents types de catastrophes survenues dans les localités de Tiassalé et N’douci à partir du logiciel Excel. De plus, l’identification des secteurs affectés par les catastrophes s’est faite à partir de la méthode cartographique basée sur l’utilisation des systèmes d’informations géographique (SIG). Les traitements cartographiques se résument à la cartographie de l’aléa naturel qui est une information utile à la décision. A cet effet, les coordonnées des secteurs touchés ont relevées à l’aide du GPS Garmin etrex. Elles ont été introduites dans le logiciel ArcGis 10.5. Les zones touchées ont été superposé sur un fond du cadastre des villes de Tiassalé et N’douci digitalisé. Les courbes de niveaux des deux localités ont été générer à partir de Surfer pour réaliser la carte topographique de ces deux villes.
En plus, l’analyse statistique a permis de faire la catégorisation des dommages humains, matériels et d’évaluer les coûts des dégâts.
2. Résultats
Dans les localités de Tiassalé et N’douci, les risques naturels qui surviennent sont la conjugaison de plusieurs facteurs. Ces facteurs sont essentiellement les pentes et l’altitude
2.1. Les aléas d’érosion et d’inondation à Tiassalé et n’douci
2.1.1. Un site topographique vallonné, propice aux catastrophes d’inondation et d’érosion L’élément caractéristique du site topographique de Tiassalé et N’douci est la forte dissection des interfluves. Cependant, le site de Tiassalé est plus favorables aux catastrophes d’inondation par rapport à N’douci qui est plutôt propice aux aléas érosion en raison de nombreux ravins qui jouxtent la ville.
Figure 2 : Topographie du site de N’douci Figure 3 : Topographie du site de Tiassalé
Au niveau de la ville de N’douci, l’aspect topographique dominant est un bas-plateau fortement disséqué par de nombreuses vallées étroites. Les altitudes varient entre 62 m et 95 m. Les altitudes les plus élevées se retrouvent au centre-ouest et au sud-est de la ville avec des pentes de 13% et les moins élevées se situent au centre-nord et à l’ouest pour des pentes de 4%
(fig. 2). Les altitudes diminuent en direction du centre vers le nord et l’ouest, d’où l’inclinaison du relief du centre vers le nord de la ville. Ce bas-plateau est traversé par une vallée dont l’orientation est : NW-SE. De forme symétrique, peu profonde, en forme de U, cette vallée traverse le centre-ville avec une trajectoire plus ou moins rectiligne. Elle présente un encaissement de l’ordre de 17 m.
A Tiassalé, la topographie est singularisée par la présence d’un bas-plateau au nord et une partie du centre et centre-est de la ville, puis d’une plaine alluviale (le long des affluents du fleuve Bandama) qui s’étend du centre jusqu’au sud de la ville. Le bas-plateau disséqué, situé au nord, occupe le 1/3 du territoire de la ville de Tiassalé. Au fur et à mesure qu’on descend vers le sud, les altitudes diminuent en passant de 55 m à 28 m. Cet état de fait permet de dire que le relief s’incline du nord vers le sud. Sur ce site, coulent les rivières pétémé et kpléglé dans la direction du fleuve Bandama au sud. Les altitudes très faibles, varient entre 28 m et 10 m. Cela donne des pentes à faible inclinaison de l’ordre de 2% (fig. 3). Cela prédispose ce site à des catastrophes d’inondation.
2.1.2. Des bas-fonds et des pentes constituent un obstacle à l’urbanisation en favorisant l’émergence des risques naturels à Tiassalé et N’douci
La pente topographique est l’une des conditions de base de la manifestation des phénomènes naturels (A. Della, 2013, p 120). Plus la pente est raide, plus l’érosion est forte. Dans le cas contraire l’érosion est faible. Les pentes sont plus fortes à n’douci qu’à Tiassalé. En effet à n’douci, les pentes inférieures à 6% occupent environ 40% de l’espace et s’étendent sur l’ensemble du territoire sauf dans la partie centrale (fig. 4). A Tiassalé, ces pentes sont essentiellement circonscrites dans la partie septentrionale et le sud-est qui représentent 15% du territoire (fig. 5). Elles constituent des déterminants non négligeables d’aléa érosion.
Figure 4 : Répartition des pentes de N’douci Figure 5 : Répartition des pentes à Tiassalé
2.2. Les zones inondables et de forte érosion à Tiassalé et à N’douci
2.2.1. Les zones d’inondation à Tiassalé et à N’douci
Les fonds de vallée sont naturellement les espaces à forte occurrence d’inondation à Tiassalé et N’douci (figs. 6 et 7).
Figure 6 : Zones inondables à N’douci Figure 7 : Zones inondables à Tiassalé
A Tiassalé, les zones inondables couvrent 333,37 ha soit 56,88 % de la superficie de la ville, tandis qu’à N’douci, ces zones inondables couvrent 502,38 ha soit 46,79 % de la superficie de la ville.
Le risque d’inondation s’étend sur des zones de pentes inférieures à 4 %. Ces zones correspondent de façon générale à des bas-fonds situés le long des cours d’eau (ahémié, mélo, pêtêfouê, épis, bléa, akotiê, alléguébrou, oppoutomiké, dabléba, kplén’glé, pétémé). Les inondations le long des rivières s’observent dans les secteurs ayant subi des modifications suite aux actions de l’homme. En effet, les rivières sont encaissées et les zones environnantes sont prédisposées à l’érosion (Kouadio. E et al, 2020, p. 7). Cependant, sous l’action de l’homme (urbanisation), certaines parties ont subi des transformations rendant la pente faible et donc exposées à l’inondation.
2.2.2. Les zones d’érosion à Tiassalé et à N’douci
Les villes de Tiassalé et N’douci sont développées sur des sols ferralitiques affectées par l’érosion hydrique liée au ruissellement des eaux pluviales non canalisées (figs. 8 et 9).
Figure 8 : Zones d’érosion à N’douci Figure 9 : Zones d’érosion à Tiassalé
La répartition spatiale de l’érosion à Tiassalé et N’douci est fonction des pentes. Plus la pente est forte plus leur susceptibilité érosive s’accentue. Elle est insignifiante sur les interfluves où les pentes sont inférieures ou égales à 4% et faible sur les versants où les pentes comprises entre 4 et 6%.
2.3. Les catastrophes naturels et leurs manifestations à Tiassalé et à N’douci
Les centres urbains de Tiassalé et N’douci sont régulièrement confrontés aux aléas inondation et d’érosion lors des différentes saisons de pluie. Même si les inondations se présentent comme des aléas principaux responsables des désagréments que connaissent les populations de Tiassalé et N’douci, le phénomène d’érosion n’est pas à négliger. L’érosion se signale sur les rares pentes que présentent ces deux villes.
2.3.1. Les manifestations de l’inondation à Tiassalé
Dans la ville de Tiassalé, l’inondation provient de trois types de phénomènes. Ce sont : la concentration des eaux de ruissellement dans les points de Vallée, la crue des différentes rivières et les remontées de la nappe phréatique (photo. 2).
Les inondations occasionnées par la crue d’une rivière sont dues au fait que l’homme fait des aménagements dans le lit de cette rivière. Cette situation devient préoccupante car elle est au centre de nombreux enjeux et menaces. Les fortes précipitations que le département de Tiassalé a enregistrées au cours de 2017 renforcent les différentes rivières qui traversent la ville de
Tiassalé en volume d’eau. Du fait de l’abondance de l’eau, l’on a assisté au débordement de nombreuses rivières présentes dans la ville occasionnant des inondations dans des quartiers de Tiassalé. On enregistre à ce niveau entre 0,75 et 1 m le niveau de l’eau au pied des maisons (photo. 1). Dans les quartiers ne disposant pas d’ouvrages de canalisation des eaux de ruissellement, l’eau stagne sur une longue durée d’environ 4 à 5 jours.
Photo 1 : Inondation par crue de rivière
Cliché : Préfecture de Tiassalé, 2017
Ces habitants se trouvent coincés dans leur maison par le débordement de la rivière car ils sont installés dans son lit au quartier prof à Tiassalé.
Photo2 : Inondation par crue de rivière
Cliché : Préfecture de Tiassalé, 2017
L’intensité de l’inondation ayant coincée des personnes chez elles, le recours de l’aide de ce pêcheur « bossoh » a été utile pour sauver d’autres personnes au quartier Arouna à Tiassalé.
2.3.2. Les manifestations de l’inondation à N’douci
La localité de N’douci par sa topographie en forme de cuvette est exposée en partie aux aléas d’inondations.
La majorité des inondations rencontrées à N’douci sont les crues des rivières qui parcourent la partie centrale de cette ville.
Les quartiers TP et commerce sont traversés par la rivière oppoutomiké qui durant les grandes saisons de pluie, sort de son lit mineur pour inonder les habitations situées aux alentours. La canalisation qui était sensée drainé le cours d’eau est obstruée par le déversement des ordures ménagères. Dès lors, le cours d’eau se fraie un chemin en s’étalant sur le bitume. En effet, son trajet naturel est occupé par les installations anarchiques telles que : des maquis et des aires de restauration (Photo 3).
Photo 3 : Inondation par crue de rivière
Cliché : Préfecture de Tiassalé, 2017
La rue principale du quartier TP est inondée
par la crue de la rivière oppotoumouké qui est sortie de son lit derrière la Gendarmerie à
N’douci.
2.3.3. Les niveaux d’eau suite aux inondations survenues à Tiassalé et N’douci en 2017
Les inondations qui se sont produites au cours de 2017 à Tiassalé et N’douci se sont manifestées de différentes manières. Cette différence s’est observée au niveau des traces d’eaux laissées sur les habitations dans ces différentes villes. Les traces d’eaux sont classées par niveau de mètre. De ce fait, 3 niveaux de classe ont été recensés : [0,5m ; 1m [, [1m ; 1,5m [et [1,5m ; 2m].
A Tiassalé, ces quartiers ont connu des fortunes diverses durant l’inondation de 2017. A cet effet, trois groupes concernant les traces d’eaux sur les habitations se dégagent (fig. 10).
Le premier groupe est constitué des quartiers François Kouadio et Dafindougou qui ont eu 20,40% et 19,59% de leurs concessions qui ont été marqué par les traces d’eaux. Le second groupe rassemble les quartiers Bété et Ptt ont vu 15,5% et 14,28% de leurs habitations marquées par les traces d’eaux. Enfin, le troisième groupe concerne les quartiers Baoulékro, Belle-ville, Résidentiel et Prof qui ont eu 9,38%, 6,93%, 2,02% et 11,83% de leurs maisons marqués par les traces d’inondation.
En faisant une comparaison par niveau d’eau laissé par l’inondation au pied des habitations, on note qu’il y a eu plus de maisons qui ont été touchés par cet aléa où les niveaux d’eau sont compris entre [0,5m ; 1m [. Cela a été observé au niveau du quartier François Kouadio pour
39,32% d’habitations concernés. A la suite, on a les niveaux compris entre [1,5m ; 2m]. C’est au quartier Prof que 33,92% des maisons sont concernés (Photo. 4).
Le niveau [1m ; 1,5m [ferme la marche pour 25% de logements touchés.
Les mêmes niveaux observés sur les habitations à Tiassalé ont également été observés à N’douci. Ici, c’est le Commerce qui a enregistré plus d’habitations touchées par les inondations dont le niveau d’eau au pied des bâtis est élevé (fig. 11).
On note dans ce quartier que 58,41% de ces bâtis ont été touchés. En sus, suit le quartier
Abbeykro où 23,35% des habitations sont marqués par les traces d’eaux. Le quartier Dallas ferme la marche avec 18,24% de maisons portant des traces d’eau.
En analysant le niveau d’eau au pied des maisons, le plus important niveau d’eau observé à N’douci se situe au quartier Commerce avec 89,07% des bâtis inondés jusqu’aux niveaux comprises entre [1,5m ; 2m] (Photo. 5).
Il faut noter que l’état des quartiers touchés varie d’un niveau à un autre en fonction du nombre élevé d’habitats touché. Le quartier Commerce est le seul à avoir été doublement touché par les niveaux [0,5m ; 1m [et [1,5m ; 2m].
Cliché : Kouakou.S.E, 2017
Une partie de cette habitation se trouvant dans le lit de cette rivière, a été inondée en laissant des traces
sur le mur au quartier Soleil (N’douci).
2.4.3. Les manifestations de l’érosion à Tiassalé et N’douci
L’érosion s’attaque aux rues et creuse des rigoles, ce qui les rend impraticables. Ces rigoles sont remarquables dans les quartiers installés sur les versants où les eaux de ruissellement, descendant, des zones en amont, y creusent tout le long de la pente des rigoles de profondeur allant de 30 à 80 cm et de largeur comprise entre 0,30 et 1 m (Photo 6).
Cliché : Kouakou.S.E, 2017
Les arbres subissent les affres de l’érosion, en mettant à nu leur système racinaire au quartier Commerce à N’douci (centre-est)
Cliché : Kouakou.S.E, 2017
L’érosion défigure le sol au quartier François
Kouadio (Nord de Tiassalé)
L’érosion se manifeste aussi sur les voies de communication à travers une forte dégradation de celle-ci. Ce qui accentue l’inclinaison des bâtis et exhument les fondations, d’où l’exposition des constructions à un risque d’écroulement.
Au fil du temps, elle détériore les fondations des habitations ou tout édifice humain avec des niveaux de décapage pouvant atteindre 75 cm (photo. 8).
Cette érosion se manifeste sous forme diffuse ou concentrée en rigoles et est accélérée par l’accroissement des surfaces dénudées et par la mauvaise régulation du drainage des eaux de pluie (Photo. 7).
Photo 8: Le niveau de décapage au pied de cette maison
Cliché : Kouakou.S.E, 2018
Cette habitation retrouve sa fondation mis à nue par l’érosion au quartier François Kouadio (Tiassalé).
Niveau de décapage : 0,5m.
3-Discussion
L’analyse des risques naturels et leurs manifestations dans les villes de Tiassalé et N’douci met à dos l’urbanisation et l’aménagement du territoire. En effet, les résultats de cette étude montre que les types d’aménagement des sites urbains de Tiassalé et N’douci encouragent les populations à s’installer sur des zones à vulnérabilité d’inondation et d’érosion élevée, occasionnant chaque année d’énormes dégâts matériels et des pertes en vie humaine. C’est ceux dont parle (Ahouanganet et al, 2012, cité par T. Ernest Roméo et al, 2022, p. 14) qui soutient l’idée selon laquelle la majeure partie des inondations est le résultat des dynamiques non encadrées de l’occupation du sol dans les grandes villes. Du même son de cloche, (B. Elodie et al, 2012, cité par T. Ernest Roméo et al, 2022, p. 14) affirment que les inondations sont dues à une urbanisation extensive et intensive engendrée par l’homme au cours des siècles à des conséquences inévitables sur la résurgence des inondations. Ces auteurs mettent l’accent uniquement sur un aspect des faits humains tout en négligeant la prise en compte de toutes les actions humaines qui peuvent accélérer le processus d’inondation sur un territoire afin de rendre celui-ci vulnérable.
Les aléas auxquels sont exposés les populations de Tiassalé et N’douci sont l’érosion et l’inondation. Au niveau de l’érosion, elle dégrade le site dans les zones d’extension de l’habitat. Cela conduit à des dysfonctionnements urbains internes. Concernant l’inondation, les zones de bas fond sont les lieux où s’observe cet aléa. Elle se matérialise par des niveaux d’eau importants aux pieds des habitations.
Ces résultats confortent ceux des études antérieures, menées dans l’une des communes d’Abidjan c’est-à-dire Abobo par (E. Kouakou, 2015, p. 37) et à Daloa par (A. Della, 2018, p.
8), qui ont mis en évidence la manifestation de l’érosion et / ou des inondations sur la dégradation des sites urbains et de l’habitat.
L’érosion et l’inondation se manifestent dans les centres urbains de Tiassalé et N’douci plus ou moins de la même manière. Concernant l’érosion, l’eau de ruissellement dans son évolution déchausse le pied des habitations, provoque leur écroulement. Il occasionne aussi le décapage des ouvrages d’assainissement, dégrade le réseau urbain et rend impraticable les rues. Cet aléa défigure le paysage urbain. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus par (D. Bawa et al, 2019, p. 13), (D. Bawa, 2017, p. 9), (T. Michel, 1994, p. 136). Tous ces travaux démontrent que la topographie constitue l’un des paramètres essentiels dans l’avènement de l’érosion dans les centres urbains. Cependant, les populations jouent un rôle déterminant dans son déclenchement.
Elles s’installent sur les versants en les dénudant, obstruent les ouvrages d’assainissements. D’autres chercheurs se sont penchés sur les inondations en milieu urbain. Ces études expliquent que la majorité des inondations sont le fait de la dynamique spatiale des villes vers les zones non aedificandi. L’inondation cause d’énormes d’dégâts aux populations. Il s’agit de la mise à hors usage des affaires personnelles, des biens matériels, la stagnation des eaux pluviales dans les concessions d’où des niveaux d’eau qui varies d’une ville à une autre en fonction de son assiette topographique. Pour (M. Zogning et al, 2017, p. 28) expliquent que les fréquences des inondations sont plus élevées dans les quartiers se trouvant dans la zone où l’inondation a lieu Pour (K. E. Konan et al, 2020, p. 537), pour eux, les inondations le long des rivières s’observent dans les secteurs ayant subi des modifications suite aux actions de l’homme. La dynamique spatiale de la tache urbaine expose la ville à des risques naturels tels que les inondations, l’érosion et les mouvements de masse. La manifestation de ces risques est accentuée par la topographie du site de la ville.
Conclusion
L’objectif de cette étude est de déterminer les risques naturels auxquels les villes de Tiassalé et N’douci sont confrontées dans leurs évolutions spatiales. Cependant, la croissance démographique et l’occupation de l’espace sans le respect des textes et lois en vigueur ont mis en évidence les risques auxquels les populations sont exposées à travers les (SIG). De l’identification des risques d’inondation et d’érosion sont en majeurs présents à Tiassalé et N’douci. Deux inondations majeures sont survenues dans ces deux localités : l’une en 2017 et l’autre en 2018. Les inondations de 2017 ont rappelé la population à une prise de conscience dans leur comportement. La manifestation de ces risques ont été dommageable pour les populations. Surtout les habitations situées dans le lit mineur des cours d’eau ou les zones inondables ont vu leurs concessions remplies d’eau. Celles situées sur les pentes importantes ont vu leurs fondations déchaussées, soit l’écroulement d’un pan de la maison. L’érosion quant elle, défigure le paysage urbain en dégradant les rues et rend l’accès difficile à certains quartiers.
C’est ainsi cette étude a permis de comprendre que les risques d’inondations et d’érosions sont fonction non seulement du changement climatique, mais aussi des caractéristiques topographiques et pédologiques de Tiassalé et N’douci, qui à leurs tours sont fonctions des activités menées par l’homme. Dans une perspective de développement urbain durable, la nécessité de la mise en place de structures et de moyens de préventions adéquats afin de réduire les impacts directs et indirects sur les populations et les établissements humains.
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