Analyse spatio-temporelle de l’occupation et l’utilisation du sol et de la dynamique urbaine de la Commune de Gandon au Sénégal

Spatio-temporal analysis of land use land cover and urban dynamics of the municipality of Gandon in Senegal

Joseph OLOUKOI, Momodou SOUMAH, Oury NIANG

African Regional Institute for Geospatial Information Science and Technology, Obafemi Awolowo University Campus, Nigeria

oloukoi@afrigist.org, soumah@afrigist.org, niangoury@gmail.com

Résumé :

L’urbanisation constitue un phénomène historique, géographiquement diversifié et une dynamique majeure dans les changements environnementaux globaux. La présente étude a utilisé les techniques de la Télédétection et des Systèmes d’Information Géographique (SIG) pour analyser la dynamique spatio-temporelle de l’occupation et de l’utilisation du sol dans la commune de Gandon dans le but de contribuer à sa planification dans la région de Saint-Louis au Sénégal. L’approche méthodologique adoptée dans cette étude a utilisé les données satellitaires Landsat TM (1990), Landsat ETM+ (2005) et OLI-TIRS (2021), pour l’analyse de l’occupation et l’utilisation du sol. Cette analyse est rendue possible par la classification supervisée avec l’utilisation de l’algorithme Maximum de vraisemblance. Les résultats montrent que les sols nus et la végétation ont été les unités les plus dominantes en 1990, occupant respectivement 84 et 7% de tout l’espace communal. En 2005, la superficie de la zone bâtie a connu une légère baisse et une remarquable concentration vers l’ouest. De même, les sols nus et la végétation ont dominé tout l’espace avec une proportion de 80% et 11% respectivement. En 2021, les sols nus ont dominé aussi l’espace à 72%, bien que leur superficie ait été réduite par rapport aux années antérieures, la végétation à 13%, et la zone bâtie à 9%. Les résultats montrent globalement une progression de la superficie des zones bâties passant de 1232 ha en 2005 à 3789 ha en 2021. De façon générale, la dynamique de l’occupation et de l’utilisation du sol a été plus intense au cours de la période 2005-2021 qu’au cours de la période 1990 et 2005, bien que l’intensité des changements uniforme des deux périodes soit estimée à 1,09%.

Mots Clés : Gandon, Occupation et utilisation du sol, Intensité des changements, Télédétection, SIG.

Spatio-temporal analysis of land use land cover and urban dynamics of the municipality of Gandon in Senegal

Abstract

Urbanization is a historical, geographically diversified phenomenon and a major dynamic in global environmental change. This study used Remote Sensing and Geographic Information Systems (GIS) techniques to analyze the spatiotemporal dynamics of land use land cover in the municipality of Gandon in order to contribute to its planning in the region of Saint-Louis in Senegal. The methodological approach adopted in the study used Landsat TM (1990), Landsat ETM+ (2005), and OLI-TIRS (2021) satellite data for the analysis of land use land cover. This analysis is made possible by the supervised classification with the use of the Maximum likelihood algorithm. Results show that bare soils and vegetation were the most dominant units in 1990, occupying 84% and 7% of all communal space, respectively. In 2005, the built-up area experienced a slight decrease and a remarkable concentration towards the west. Similarly, bare soil and vegetation dominated the entire space with a proportion of 80% and 11% respectively. In 2021, bare soils also dominated the space at 72%, although their area was reduced compared to previous years, with vegetation at 13%, and built-up area at 9%. The results show an overall increase in the surface area of built-up areas from 1,232 ha in 2005 to 3,789 ha in 2021. In general, the dynamics of land use land is more intense during the 2005 -2021 period than between 1990 and 2005, although the uniform intensity of change of the two periods is estimated at 1.09%.

Keywords: Gandon, Land use land cover, Intensity of Changes, Remote Sensing, GIS.

Introduction

La dynamique urbaine s’est intensifiée au cours de ces dernières décennies sous l’effet des activités humaines sur l’environnement et le paysage urbain de façon générale. Les changements observés sur l’occupation et l’utilisation des terres sont la manifestation directe des conséquences des activités humaines sur la surface terrestre (J.J. Lawler et al., 2014, p. 1 ; E.F. Lambin et al., 2001, p. 262), la terre étant considérée comme le vecteur spatial des activités sociales, économiques et culturelles (R. Yang et al., 2022, p. 1; M. P. Perring et al., 2016, p. 1362). Depuis le 21ème siècle, le phénomène de

l’urbanisation est devenu majeur dans les changements globaux avec un complexe spatial affecté par des facteurs biophysiques et anthropiques (S. Angel et al., 2011, p. 53 ; P. Sylva et al., 2017, p. 2 ; B. K. Terfa et al., 2019, p. 2 ; Schneider et al., 2008, p. 660). De moins de 10 % au début du siècle, la proportion de la population mondiale habitant dans des villes atteint actuellement plus de 50 % (D. Nassori, 2017, p. 68). Sur le continent africain, entre 1950 et 2015, la population urbaine africaine est passée de 27 millions à 567 millions de personnes. Les dynamiques urbaines en Afrique sont particulièrement complexes à comprendre pour des raisons de définitions et aussi le manque de données démographiques fiables et à jour (P. Heinrigs, 2020, p. 18).

Au Sénégal, le phénomène d’urbanisation a contribué à la formation de pôles urbains, avec l’existence de communes formelles telles que Dakar, Rufisque, Gorée et Saint Louis. Ces communes sont considérées comme des villes, où s’exerçait l’essentiel des activités politiques et économiques. Selon C.S. Wade (1995, p. 23), les fonctions de capitale de l’Afrique Occidentale Française (AOF), du Sénégal et de la Mauritanie que la ville de Saint Louis a simultanément occupé avaient fait d’elle la ville la plus prospère de la Région. Toutefois, sa croissance urbaine est contraignante à cause de sa situation physique dominée par les infrastructures bleues (eau). Cette situation a occasionné l’occupation des zones non aedificandi généralement caractérisées par l’inondation saisonnière, le manque d’assainissement, et la prolifération des habitats irréguliers (A. Coly et al., 2015, p 72). La dynamique de la ville de Saint-Louis affecte aussi son espace périphérique dont la commune de Gandon. Cette commune, dispose d’une réserve foncière très importante. Elle connaît une expansion urbaine depuis la construction de l’Université Gaston Berger en 1975 et la création d’une zone d’aménagement liée (ZAC) en 2005 par la mairie de Saint-Louis. Ses quartiers sont des villages traditionnels et leur création remonte à bien avant la création de l’université (O. Diop, 1996, p. 181).

Le présent article vise à analyser la dynamique spatiale de la commune de Gandon au Sénégal en montrant les différentes phases d’évolution de l’occupation et de l’utilisation du sol de 1990 à 2021, en relation avec l’extension urbaine sur la base des techniques de la télédétection et des Systèmes d’Information Géographique.

1.        Secteur d’étude

Située dans le département de Saint-Louis, et dans l’arrondissement de Rao, entre 15° 50’ et 16° 20’ de latitude nord et 16° 28’ et 16° 23’ de longitude ouest, la commune de Gandon est limitée au Nord et Nord-Est par la commune de Diama, au sud par la commune de Leona, au Sud-ouest par la Commune de Ndiébene Gandiol, à l’Ouest par l’océan Atlantique, à l’Est par la commune de Fass Ngom, et au Nord- Est par la commune de Ngnith (carte 1).

Le milieu physique est constitué de deux zones écologiques distinctes à savoir le Walo, situé dans la partie Nord et Nord-Est de la commune et le Diéri, localisé dans la partie Est et Sud-Est. Le relief de la Commune est dans l’ensemble plat. Le réseau hydrographique est constitué des cours d’eau tels que le Ndialakhar, le Minguegne, le Khant, le Ngalam, etc. La végétation est dominée par la steppe arbustive. Le climat est de type subcanarien et est caractérisé par une saison sèche froide de Novembre à Février avec un climat stable, humide et frais, une saison sèche chaude de Mars à Juin avec une température élevée et progressive avec des vents chauds et secs, une saison des pluies de Juillet à Octobre avec une température élevée et stable avec une moyenne de 30° C.

Carte 1: Situation de la zone d’étude

La population de Gandon est passée de 40763 habitants à 44086 habitants en 2016, selon le dernier recensement général de la population, de l’habitat, de l’agriculture et de l’élevage. La commune s’étend sur une superficie d’environ 42000 ha, avec une densité de population estimée à 105 habitants par km². Cette dernière est largement supérieure à celle de la région de Saint-Louis qui est de 47,80 habitants par km². La population de Gandon représente 4,48 % de la population de la région de Saint- Louis et 0,31 % de la population totale du Sénégal.

2.        Matériels et méthodes

2.1 Données et Matériels

La présente étude a utilisé des images satellitaires, des données vectorielles, et des statistiques existantes sur le milieu d’étude. Les données satellitaires sont composées essentiellement des images Landsat TM du 05 Décembre 1990, Landsat ETM+ du 05 Février 2005, et enfin Landsat OLI-TIRS du 24 Janvier 2021. Les données vectorielles sont des fichiers de forme (shapefiles) des routes, limites administratives (Région, Département, Commune), du réseau hydrographique, et enfin des zones de cultures. Les caractéristiques des données utilisées dans cette étude, sont résumées dans le tableau 1.

Tableau 1: Caractéristiques des données utilisées

2.2. Traitements des données des images pour l’analyse de la dynamique spatiale de l’occupation du sol

Amélioration de la qualité et du contraste des images

La scène de Landsat ETM+ a été affectée par des erreurs de correction des lignes de scannage (Scan Lines Corrections – SLC) et présente donc des rayures. Des corrections ont été apportées à cette image en utilisant l’extension ‘Landsat – gapfill’ dans le logiciel ENVI 4.7. Le regroupement des bandes (stacking) des images de chaque capteur de Landsat a été fait et a permis de mettre ensemble les bandes ayant la même résolution. La composition colorée a permis d’améliorer la qualité graphique de l’image et par conséquent une bonne interprétation de celle-ci (J. Oloukoi, 2016, p. 142). Elle a consisté à combiner les bandes 4, 3 et 2 pour Landsat TM et ETM+, et les bandes 5, 4 ,3 pour le capteur OLI-TIRS.

Classification supervisée des images

Quatre classes d’occupation et utilisation du sol ont été déterminées suite à une interprétation visuelle des images. Il s’agit des zones bâties, des sols nus, des plans d’eau, et de la végétation. Il faudrait noter que la végétation inclut aussi les champs qui sont déjà en jachères mais qui ne sont pas identifiables directement sur l’image à cause de la résolution spatiale. Les sols nus incluent en partie les champs déjà cultivés ou nouvellement préparés durant la période. La classification s’est déroulée par la création des parcelles d’entrainement pour chaque classe, la description et le renseignement des différentes classes, le choix de l’algorithme de classification qui est ici le maximum de vraisemblance (S. Zhao et al., 2020, p. 4; J. Oloukoi, 2012, p. 71). Pour la classification de l’image de 1990, 35 pixels d’entrainement ont été utilisés pour les plans d’eau, 38 pour la végétation, 87 pour les sols nus et 26 pour les zones bâties, soit au total 186 parcelles d’entrainement. Pour l’image ETM+ de 2005, la classification s’est basée sur 31 pixels d’entrainement pour les plans d’eau, 21 pour la végétation, 20 pour les sols nus et 20 pour les zones bâties, soit au total 92 pixels d’apprentissage. Quant à l’image OLI-TIRS de 2021, 278 pixels d’entrainement ont été utilisés, soit 40 pour les plans d’eau, 81 pour la végétation, 111 pour les sols nus et 46 pour la zone bâtie.

La validation de la classification s’est faite en utilisant les données de ESA (European Space Agency) World Cover 2021 disponible sur la plateforme de Digital Earth Africa (https://maps.digitalearth.africa/). Il s’agit d’un produit global de 10 m de résolution rendu accessible dans le cadre du projet Digital Earth Africa. Le produit utilise les images Sentinel-1 et Sentinel-2.

Nous avons aussi combiné ce produit à Google Earth dans le processus de la validation. Ainsi 30 points ont été vérifiés sur ces plateformes de haute résolution par classe d’occupation et utilisation du sol. L’évaluation de la précision de la classification a été faite en utilisant la matrice de confusion pour chaque image classifiée. Les paramètres tels que l’Indice de Pureté des Classes (IPC), l’Indice de Validation Cartographique (IVC), de même que les erreurs de commission (EC), les erreurs d’omission (EO) ont permis d’apprécier la précision de la classification. La classification de l’image TM de 1990 a montré que des pixels ont été confondus dans les différentes classes d’occupation du sol. La précision totale est de 62,5 % pendant que l’Indice de Pureté des Classes est estimé à 65% et l’Indice de Validation Cartographique 78,7%. La classification de l’image ETM+ de 2005 a révélé des commissions et omissions au niveau des classes. La précision globale de la classification est estimée à 86,36 % et l’Indice de Pureté des Classes 85,45 % et l’Indice de Validation Cartographique 88,3 %. Quant à la classification de la troisième image, elle a affiché une précision totale de 64 % tandis que l’Indice de Pureté des Classes est calculé à 71,9 % et l’Indice de Validation Cartographique 80,2 %. Par la suite, nous avons procédé à la détection des changements et à leur analyse quantitative sur la base des matrices de transition. L’analyse des matrices de transition est basée sur l’approche proposée par Aldwaik and Pontius (2012, p 3-4) sur les intensités de changement. C’est une méthode quantitative d’analyse des occurrences de changements sur une ou plusieurs périodes dans une zone d’étude donnée à l’aide des matrices de transition. L’organigramme méthodologique de l’approche utilisée pour ce travail est présenté dans la figure 1.

Figure 1. Organigramme méthodologique

3.       Résultats et Discussion

3.1.     Analyse de la dynamique spatiale de l’occupation du sol de la commune de Gandon

De 1990 à 2005, des changements ont été observés entre les différentes unités d’occupation et d’utilisation du sol dans la commune de Gandon. Les unités de l’occupation et utilisation du sol ont évolué selon les années. Par exemple en 1990, il y a eu moins d’étalement du bâti qui s’est juste concentré vers l’ouest (carte 2). Les sols nus et la végétation ont été les unités les plus dominantes occupant respectivement 84 et 7% de tout l’espace communal.

Carte 2 : Occupation et utilisation du sol en 1990

En 2005, la superficie de la zone bâtie a connu une légère baisse et une remarquable concentration vers l’ouest (figure 4). Les sols nus et la végétation ont dominé tout l’espace avec une proportion de 80% et 11% respectivement (tableau 2).

Tableau 2 : Superficie et taux de changement de l’occupation du sol de 1990 à 2005

Carte 3: Occupation et utilisation du sol en 2005

Entre 1990 et 2005, les plans d’eau et la végétation ont progressé tandis que les autres classes ont connu une régression relative de leur superficie.

En 2021, l’occupation et l’utilisation du sol a été dominée par les sols nus avec 72%, bien que leur superficie ait été réduite par rapport aux années antérieures, la végétation avec 13% et la zone bâtie avec 9%. Ainsi la carte révèle une augmentation des espaces bâtis surtout au centre de la commune (carte 4). Il est aussi constaté une progression des plans d’eau et de la végétation. L’évolution de la superficie des unités d’occupation du sol entre 2005 et 2021 est présentée dans le tableau 3.

Tableau 3 : Superficie et taux d’évolution annuel de 2005 à 2021

Carte 4 : Occupation et utilisation du sol en 2021

Les résultats montrent globalement une progression de la superficie des zones bâties passant de 1232 ha en 2005 à 3789 ha en 2021. Une régression de la superficie des sols nus est aussi notée.

3.2.  Intensité des changements

L’analyse de la matrice de transition entre 1990 et 2005 (tableau 4) montre une stabilité des superficies des unités d’occupation et utilisation du sol entre 1990 et 2005 à près de 86 %. L’analyse de cette matrice montre une très forte stabilité des sols nus (75,8 %).

Tableau 4 : Matrice de transition entre 1990 et 2005

La figure 1 présente les tendances des changements des unités d’occupation du sol de 1990 à 2005.

Figure 1 : Intensité des gains et pertes par unité d’occupation du sol de 1990 à 2005

L’analyse de la figure 1 montre que les unités comme la végétation et les plans d’eau, ont enregistré plus de gain que de perte. Quant aux unités comme la zone bâtie, et les sols nus, leur intensité de perte a été plus élevée au cours de la période 1990-2005. L’intensité de changement uniforme de toutes les unités, tourne autour de 0,94 %.

Selon la matrice de transition des unités de l’occupation et utilisation du sol entre 2005 et 2021, l’occupation et l’utilisation du sol a été stable à près de 80 % (tableau 5). Comme entre 1990 et 2005, les sols nus restent l’unité la plus stable au cours de la période avec 66,8%.

Tableau 5: Matrice de transition entre 2005 et 2021

Les intensités de changement ont révélé des gains et des pertes au niveau des unités de l’occupation et utilisation du sol (figure 2). Par exemple, il a été observé que les unités comme la zone bâtie, la végétation, et les plans d’eau ont eu plus de gain que de perte. L’intensité de changement uniforme est estimée à 1,24 %, légèrement supérieure à celle de la période 1990-2005.

Figure 2: Intensité des gains et pertes par unité d’occupation du sol de 2005 à 2021

De façon générale, la dynamique de l’occupation et utilisation du sol a été plus intense au cours de la période 2005-2021 que celle entre 1990 et 2005 (figure 3), bien que la moyenne des intensités uniformes des deux périodes soit estimée à 1,09%.

Figure 3 : Intensité des changements des deux périodes

3.3.  Tendance directionnelle de l’évolution des zones bâties

Dans le but d’apprécier la dynamique urbaine, l’intérêt a été porté sur la transformation des autres unités d’occupation et utilisation du sol en espaces bâtis. Ainsi, au cours des deux périodes, la plupart des unités ont été converties en bâti. Entre 1990 et 2005, les unités comme les sols nus et la végétation, ont connu une large transition vers les zones bâties (figure 4). Les plans d’eau l’ont été à une faible proportion. Cette transition vers les bâtis a évolué à une vitesse ou intensité de 0,12% par an au cours de la période 1990-2005.

Figure 4 : Transition des unités d’occupation des sols vers les bâtis entre 1990 et 2005

La même analyse faite entre 2005 et 2021, a montré que les sols nus et la végétation ont été largement convertis en espaces bâtis (figure 5). Les plans d’eau qui sont en fait des espaces aquatiques ou humides, l’ont été faiblement. La conversion des unités vers les zones bâties entre

2005 et 2021, s’est faite à une vitesse annuelle estimée à 0,45% par an, ce qui est supérieur à celle de la période 1990-2005.

Figure 5: Transition des unités d’occupation des sols vers les bâtis entre 2005 et 2021

L’espace autour de l’Université Gaston Berger (UGB) connait des mutations multisectorielles impactant sur l’occupation et l’utilisation du sol. Elles se matérialisent par un étalement et une densification du bâti, plus ou moins synchrone à l’occupation d’une partie des espaces agricoles, donc de la végétation en 2021. Ainsi les espaces bâtis se sont étendus en 2021 comparativement aux autres années (figure 6). Les superficies ont évolué de 1688 ha en 1990 à 3789 ha en 2021.

L’extension des espaces bâtis et leur direction est implicitement liée à l’implantation de

l’Université Gaston Berger (UGB). En tant que point structurant, l’UGB a constitué un facteur d’attraction.

Figure 6 : Evolution de la surface des zones bâties de 1990 à 2021

D’autres facteurs tels que le manque d’espace de plus en plus manifeste dans le centre-ville et la disponibilité de parcelles de terres habitables, en phase aux nombreux lotissements réalisés dans ce secteur, sont également évoqués. Ainsi, il a été constaté une concentration remarquable des espaces bâtis vers l’ouest de la commune (carte 5).

Carte 5 : Tendance directionnelle et étalement des espaces bâtis de 1990 à 2021

4.        Discussion

Les données d’observation de la terre constituent des moyens efficaces pour l’extraction de l’occupation et de l’utilisation du sol et surtout des espaces bâtis pour une étude de l’extension urbaine. Les zones bâties ont connu une progression de 4 % en 1990 à 9% en 2021. Les résultats similaires avaient été obtenus par C.S. Dahande et al. (2021, p. 73) dans une étude spatio-temporelle de l’occupation des terres au sud du plateau de Sakété au Bénin, entre 2002 et 2020. En effet, ces auteurs avaient conclu à une forte urbanisation observée au Sud du Plateau de Sakété principalement dans les communes de Adjarra, Avrankou, Akpro-Missérété, Dangbo et Porto-Novo, où l’espace urbain a connu une progression de plus de 41 % en 18 ans. Aussi, les résultats de la présente étude quant à l’extension des espaces bâtis, confirment les analyses faites par J. Oloukoi et al. (2014, p. 137) dans l’étude de la dynamique urbaine de la ville d’Ile-Ife au sud-ouest du Nigeria. Les auteurs avaient observé que les espaces bâtis constituaient la seconde unité d’occupation des terres la plus large, avec une proportion de 8,6 %, ayant connu une progression de 25,6 % en 2002 à plus 30 % en 2009. La présente étude a aussi constaté une polarisation de l’extension du bâti dans les zones à proximité ou autour de l’Université Gaston Berger. Cela confirme les résultats des travaux de B.F. Sy et al. (2020, p. 158) qui se sont basés sur la cartographie diachronique par le traitement d’images satellitaires pour analyser l’évolution de l’occupation de l’espace périphérique de l’UGB de Saint- Louis de 2000 à 2019. Lesdits auteurs avaient révélé comme moteur principal de cette dynamique, la présence de plusieurs coopératives d’habitats. La période est marquée par la création de la ZAC (Zone d’Aménagement Concertée) en 2005, la coopérative d’habitat du CROUS (Centre Régional des Œuvres Universitaires de Saint-Louis) qui a obtenu 10 ha. Il y a également la coopérative d’habitat du Rectorat qui a bénéficié dans les mêmes conditions de 07 ha sur le même site en 2000 (M.L. Diop, 2011). L’extension des zones bâties a été considérée comme un indicateur de la dynamique urbaine dans la plupart des travaux sur la dynamique des territoires et la présente étude ne déroge pas à cette

logique. Toutefois, bien qu’elle ait fourni des informations sur la structure des unités de l’occupation et utilisation du sol dans la commune de Gandon et leur évolution dans le temps et dans l’espace, elle a manqué de s’intéresser aux métriques urbaines tels que la densité des taches, les indices de forme du paysage (Y. Hu et al., 2020, p 5), des unités de l’occupation et utilisation du sol. Les indicateurs de consommation et d’absorption foncières n’ont été pas été aussi abordés.

Conclusion

L’article sur l’analyse spatio-temporelle de la dynamique urbaine de la commune de Gandon au Sénégal a utilisé les techniques de la télédétection et des systèmes d’information géographique (SIG) pour analyser la dynamique de l’occupation et utilisation du sol, de 1990 à 2021. L’analyse a montré une extension des zones bâti, une dominance des sols nus et de la végétation. L’étude a constaté une forte intensité des changements de l’occupation et utilisation du sol au cours de la période 2005-2021 comparée à la période1990-2005. Cette analyse des changements a montré que l’extension du bâti est intrinsèquement liée aux besoins d’espace pour l’habitation. Pour un bon suivi de la dynamique de l’occupation du sol de la Commune de Gandon et afin de contrôler l’étalement urbain, il est nécessaire de revisiter les plans d’urbanisation pour maitriser l’extension des zones d’habitation, d’opter clairement pour la protection des écosystèmes naturels notamment ceux humides et les aires protégées, et de délimiter les espaces agricoles pour ne pas courir le risque de plonger la commune dans l’insécurité alimentaire dans un avenir proche ou lointain.

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